octobre - novembre 2014
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anform !
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“A
u départ, on est
submergé
par
l’émotion. On a tel-
lement attendu ce
moment, on s’est tellement préparé, on
ne pense à rien. On fait connaissance
avec son corps, avec ses sensations.
On en profite pour faire les derniers
réglages de sac”
, explique François
d’Haene, 29 ans. En 2013, ce vigneron
du Beaujolais a survolé le Grand Raid
en 22 h 58. Àpeine 1 an plus tard, le
30 août 2014, il boucle l’Ultra-Trail du
Mont-Blanc en 20 h 11, battant le re-
cord de l’épreuve.Et le 23octobre 2014
à 23 h, il sera encore sur la ligne de
départ pour la course réunionnaise.
“Le
Grand Raid a la particularité d’offrir un
parcours toujours varié, avec un départ
de nuit, le volcan, les différents cirques,
la vue sur la mer.Cette variété empêche
la lassitude”,
souligne le trailer. Mais
comme l’explique l’entraîneur Daniel
Bigot, 65 ans et 3 Grands Raids à son
actif,
“sur une telle course,il faut arriver à
raisonner. L’intelligence joue beaucoup.
Il faut prendre les bonnes décisions,
comme se reposer 2 h quand ça ne va
pas. Cela peut permettre d’en gagner
4.”
François d’Haene ne dit pas autre
chose. La réflexion est permanente tout
au long de la course.
“Au bout de 3 ou
4 h, on commence à réfléchir à la suite
de la course,
souligne-t-il.
Comment va
se passer la suite, quand vais-je man-
ger, comment affronter la nuit. Et puis,
au bout d’un moment, il faut laisser la
place à l’imagination. Ce coucher de
soleil, on en avait rêvé, le voilà. Il faut
en profiter. Tout dépend de l’état dans
lequel on est. Mais c’est aussi impor-
tant de penser à des choses positives,
à de bons souvenirs, aux gens qu’on
aime. Le négatif, les douleurs, on les
garde pour les pauses, les ravitaille-
ments. En échangeant avec les autres,
on les évacue.”
“J’AI EU
DES HALLUCINATIONS”
Pour Cédric Toiron, principal adjoint
du collège des Aigrettes et ancien
professeur d’EPS, l’échange a en effet
été décisif lors de son Grand Raid en
2010 (bouclé en 40 h).
“Au début de
la course, j’étais très bien, dans les
temps que je m’étais fixés. J’ai pris
beaucoup de plaisir. C’était l’année
de l’éruption du volcan, un spectacle
inouï. Et puis à Mare à Boue, je me suis
blessé au genou et là, j’ai commencé à
broyer du noir, à penser à la fin, à me
poser des tas de questions sur le but
de cette course. Arrivé à Cilaos, Daniel
Bigot, mon entraîneur, était là. J’ai pris
1 h de pause. Mentalement, cela m’a
fait énormément de bien. Physique-
ment aussi ! Je suis reparti boosté.”
Il
est tellement boosté qu’il saute deux
ravitaillements dans Mafate, remonte
le classement, mais gère mal son ali-
mentation et son effort.
“J’étais eupho-
rique, tout allait bien mais j’étais en
hypoglycémie et j’ai commencé à avoir
des hallucinations. J’ai vu un 4x4 et
des pêcheurs de bichiques, je leur ai
même parlé… en me rendant compte
que je délirais et qu’il n’y avait ni 4x4,
forme
Cédric Toiron :
“Tu penses à tout
ce qui peut t’aider
à avancer :
tes enfants,
ta famille, tous
ceux avec qui tu
as partagé cette
histoire.”
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