Previous Page  85 / 100 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 85 / 100 Next Page
Page Background

mars - avril 2015

anform !

85

quences de cette violence chronique

et insidieuse varient d’une personne

à l’autre, du vécu intime de chacune,

de son niveau de fragilité,d’isolement,

de distanciation.En plus de la blessure

narcissique repérable dans la majorité

des situations,on trouve une variétéde

symptômes d’un état dépressif et/ou

anxieux et l’existence d’une mémoire

traumatique (sentiment d’insécurité,

vision négative de l’avenir, ressasse-

ment, hypervigilance…

”Le travail psy-

chothérapique permet

“de les aider à

exprimer la honte, la culpabilité, la co-

lère,mais aussi les sentiments ambiva-

lents de haine et d’amour envers leurs

conjoints.Il s’agira, au fil des séances,

de les aider à se dégager d’un état

de sidération qui fige les émotions,

la pensée, les souvenirs, le rapport à

l’autre. Cela permettra de revenir à

l’histoire personnelle et d’essayer de

comprendre comment la personne

est entrée dans ce type de relation

destructrice.Comment elle s’est sura-

daptée”.

RESTAURER SON IMAGE

À l’association, elles peuvent se

détendre dans un espace couvert

donnant sur une petite cour, partager

une boisson chaude… Rompre avec

l’isolement. Être écoutées sans être

jugées. Une fois par semaine, elles

peuvent assister à des groupes de

parole. Objectif : bénéficier du sou-

tien et de l’expérience des autres.

L’accompagnement se fait égale-

ment par des ateliers corporels ou

des activités organisés par l’associa-

tion (massage, esthétique, cuisine,

activités manuelles…).

“L’atelier

massage permet de se relaxer, d’éva-

cuer le stress, de se réconcilier avec

son corps, de se réapproprier ce

corps blessé”,

décrit Sophie Ryon,

animatrice.

“Les ateliers manuels

encouragent la créativité. L’atelier

maquillage aide beaucoup àla reva-

lorisation de l’image de soi.”

REFAIRE SA VIE

Malgré tout,

“la reconstruction sera

lente. Des mois, voire des années”

,

prévient l’assistante sociale.

“Je me

souviens d’une femme qui avait tout

quitté pour retrouver son premier

amour. Un homme violent. Tant la

rupture que la reconstruction ont été

difficiles.”

Il y a aussi cette dame, res-

tée attachée à l’accueil de jour :

“Elle

vient souvent nous voir. Dans son

discours, elle en veut toujours aux

hommes. Elle véhicule cette haine

à ses enfants. L’image de l’homme

semble àjamais détruite.”

3 QUESTIONS À...

Maître Déborah Mencé,

avocate

Quel est votre rôle

en tant qu’avocate au sein

de l’association ?

J’apporte ma contribution par

un accompagnement juridique :

officialiser la séparation, régler

les conséquences liées à la

séparation (biens, garde des

enfants)…Mon rôle est aussi

de les accompagner dans leurs

démarches pénales, c’est-à-dire

la condamnation des auteurs de

violences.

Les femmes battues sont-elles

protégées par la loi ?

Oui, bien entendu. Notamment

depuis la réforme de la loi du

9 juillet 2010 (relative aux vio-

lences faites spécifiquement aux

femmes, aux violences au sein

des couples et à leurs incidences

sur les enfants). C’est une loi

qui a créé une ordonnance de

protection, un dispositif qui

permet à la victime d’obtenir

l’éviction du domicile de l’auteur

des violences afin d’échapper à

son emprise. Car souvent, elles

ne savent pas où aller.

Comment se déroulent

les procédures de divorce

en cas de violence conjugale ?

La procédure classique débute

par une requête à l’initiative de

la victime assistée d’un avocat.

Dans cette requête, on motive

la demande, les circonstances

qui laissent penser qu’il y a

danger. Dès réception, le juge

convoque les parties deman-

deresse et défenderesse pour

une audition. À l’issue, si le

juge estime que le danger est

caractérisé, il rend une ordon-

nance et est compétent pour

ordonner l’expulsion de l’auteur

des violences. Ensuite, la

procédure suit son cours. C’est

la procédure de droit commun.

L’ordonnance de protection est

reconduite jusqu'à la décision

de divorce. En moyenne, les

divorces pour faute sont les

plus longs. Il faut compter au

moins 2 ans.

psycho