

mars - avril 2015
•
anform !
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quences de cette violence chronique
et insidieuse varient d’une personne
à l’autre, du vécu intime de chacune,
de son niveau de fragilité,d’isolement,
de distanciation.En plus de la blessure
narcissique repérable dans la majorité
des situations,on trouve une variétéde
symptômes d’un état dépressif et/ou
anxieux et l’existence d’une mémoire
traumatique (sentiment d’insécurité,
vision négative de l’avenir, ressasse-
ment, hypervigilance…
”Le travail psy-
chothérapique permet
“de les aider à
exprimer la honte, la culpabilité, la co-
lère,mais aussi les sentiments ambiva-
lents de haine et d’amour envers leurs
conjoints.Il s’agira, au fil des séances,
de les aider à se dégager d’un état
de sidération qui fige les émotions,
la pensée, les souvenirs, le rapport à
l’autre. Cela permettra de revenir à
l’histoire personnelle et d’essayer de
comprendre comment la personne
est entrée dans ce type de relation
destructrice.Comment elle s’est sura-
daptée”.
RESTAURER SON IMAGE
À l’association, elles peuvent se
détendre dans un espace couvert
donnant sur une petite cour, partager
une boisson chaude… Rompre avec
l’isolement. Être écoutées sans être
jugées. Une fois par semaine, elles
peuvent assister à des groupes de
parole. Objectif : bénéficier du sou-
tien et de l’expérience des autres.
L’accompagnement se fait égale-
ment par des ateliers corporels ou
des activités organisés par l’associa-
tion (massage, esthétique, cuisine,
activités manuelles…).
“L’atelier
massage permet de se relaxer, d’éva-
cuer le stress, de se réconcilier avec
son corps, de se réapproprier ce
corps blessé”,
décrit Sophie Ryon,
animatrice.
“Les ateliers manuels
encouragent la créativité. L’atelier
maquillage aide beaucoup àla reva-
lorisation de l’image de soi.”
REFAIRE SA VIE
Malgré tout,
“la reconstruction sera
lente. Des mois, voire des années”
,
prévient l’assistante sociale.
“Je me
souviens d’une femme qui avait tout
quitté pour retrouver son premier
amour. Un homme violent. Tant la
rupture que la reconstruction ont été
difficiles.”
Il y a aussi cette dame, res-
tée attachée à l’accueil de jour :
“Elle
vient souvent nous voir. Dans son
discours, elle en veut toujours aux
hommes. Elle véhicule cette haine
à ses enfants. L’image de l’homme
semble àjamais détruite.”
3 QUESTIONS À...
Maître Déborah Mencé,
avocate
Quel est votre rôle
en tant qu’avocate au sein
de l’association ?
J’apporte ma contribution par
un accompagnement juridique :
officialiser la séparation, régler
les conséquences liées à la
séparation (biens, garde des
enfants)…Mon rôle est aussi
de les accompagner dans leurs
démarches pénales, c’est-à-dire
la condamnation des auteurs de
violences.
Les femmes battues sont-elles
protégées par la loi ?
Oui, bien entendu. Notamment
depuis la réforme de la loi du
9 juillet 2010 (relative aux vio-
lences faites spécifiquement aux
femmes, aux violences au sein
des couples et à leurs incidences
sur les enfants). C’est une loi
qui a créé une ordonnance de
protection, un dispositif qui
permet à la victime d’obtenir
l’éviction du domicile de l’auteur
des violences afin d’échapper à
son emprise. Car souvent, elles
ne savent pas où aller.
Comment se déroulent
les procédures de divorce
en cas de violence conjugale ?
La procédure classique débute
par une requête à l’initiative de
la victime assistée d’un avocat.
Dans cette requête, on motive
la demande, les circonstances
qui laissent penser qu’il y a
danger. Dès réception, le juge
convoque les parties deman-
deresse et défenderesse pour
une audition. À l’issue, si le
juge estime que le danger est
caractérisé, il rend une ordon-
nance et est compétent pour
ordonner l’expulsion de l’auteur
des violences. Ensuite, la
procédure suit son cours. C’est
la procédure de droit commun.
L’ordonnance de protection est
reconduite jusqu'à la décision
de divorce. En moyenne, les
divorces pour faute sont les
plus longs. Il faut compter au
moins 2 ans.
psycho