

mars - avril 2015
•
anform !
91
Huguette,
La question que vous vous posez est effectivement "de poids" : continuer à
garder un secret qui, certes, vous concerne directement, mais qui a été mis en
place non pas par vous mais par votre mère ! Ce que je retiens tout d'abord
c'est qu'une partie de vous a le désir de partager cela avec vos enfants. Ce
désir me semble tout à fait intéressant et renvoie, selon moi, à un désir de
réparer la petite fille que vous étiez et qui a justement été privée d'une part de
son histoire. Il y a également une autre part de vous qui s'interroge sur l'utilité
de le dire à vos enfants, avec la peur de les encombrer avec cette information.
Chercher à partager ce poids ne me semble pas opportun. Je vous invite
à creuser plus profondément la question de la nécessité que vous avez de
partager avec eux ce secret ? Au départ, c'est votre mère qui a fait de cette
part de votre histoire un secret : pour quelle raison ? Vraisemblablement, pour
se protéger elle-même ! Vous n'êtes plus obligée, Huguette, de continuer
à jouer sur le registre du secret ! Comme vous le dites, c'est votre histoire,
il vous appartient donc aujourd'hui d'en disposer ou d’en parler comme
bon vous semble. Si vous souhaitez en parler avec vos enfants, libre à vous.
Mais pour sortir de cette position subie depuis votre enfance, il est plus que
temps de vous réapproprier ce fait et de ne plus l'évoquer en terme de poids.
Autrement dit, il serait intéressant que ce secret ne soit plus pesant pour vous-
même mais qu'il redevienne une information qui vous concerne et que vous
serez libre de partager avec les personnes adéquates.
Dois-je révéler ce secret
à mes enfants ?
Cela fait 35 ans que je vis avec un secret
de famille. Mon père n’est pas mon père
biologique. Je l’ai appris par accident,
dans une fête de famille bien arrosée.
Ils n’ont pas fait attention à ma présence
et la vérité a été dite. À l’époque, j’ai
discuté avec ma mère qui m’a fait
promettre de ne rien dire. Aujourd’hui,
maman est morte. Cette nouvelle me
pèse sur le cœur. Surtout par rapport
à mes frères et ma sœur que j’aime
beaucoup. Est-ce que cela change-
rait quelque chose ? Mon père, lui, a
accepté de faire comme si j’étais sa fille
et, dans la réalité, je suis sa fille. Car,
de mon père biologique, je ne sais rien.
Aujourd’hui, j’ai des enfants et je me
demande s’il faut leur dire et partager ce
poids. D’une certaine façon cela fait par-
tie de leur histoire aussi. Mais à quoi bon
les encombrer avec cette information ?
Huguette, Guyane
Incapables
d’envisager
la vie à moins
de trois
Je voudrais réagir au courrier de
Franck, publié dans un précédent
numéro d’anform. Car j’ai vécu la
même histoire. Sauf qu’elle ne se
finit pas pareil. En effet, il y a des
années, je vivais avec une jeune
femme me convenant en toutes
choses. Nous nous entendions
bien et à tous les niveaux... Comme
Franck, un jour, j’ai découvert
qu’elle me trompait. Je n’ai pas
voulu créer un conflit. Et notre
complicité était importante. Donc,
j’ai ouvertement parlé de ma
découverte et proposé qu’elle me
présente son amant. Un soir, donc,
elle est arrivée à la maison avec...
une femme ! Surprise réussie de sa
part. Je suis resté sans voix pendant
une heure. Mais je voyais bien que
les deux femmes s’entendaient
parfaitement et que la nouvelle
venue “collait” à notre manière de
voir les choses. Lorsque j’ai repris
mes esprits, nous étions enlacés
tous les trois. Ce soir a été le
début de quelques années de vrai
bonheur ! Incapables d’envisager
la vie à moins de trois. Une chose
incroyable se reproduisait tous
les jours, impossible à raconter,
une entente parfaite dans laquelle
personne ne jalousait, personne ne
critiquait, personne ne prêtait de
mauvais sentiments aux autres...
un bonheur. Et un équilibre sexuel
incomparable.Malheureusement,
la vie reprend souvent ce qu’elle
donne. Et la maladie a emporté
mon premier amour. Nous vivons
aujourd’hui dans le souvenir de
l’autre, repus d’une relation unique.
Ca me fait du bien de vous raconter
ça. Merci anform ! Mon témoignage
donnera peut-être envie à d’autres
de raconter leur histoire.
Eddy, Martinique