novembre - décembre 2014
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forme
palement les conditions de course qui
déterminent les moments de repos
des skippers.Lors des changements de
vents, le sommeil est court.Àl’inverse,
des vents constants permettent aux
marins de se reposer pleinement et
de soigner leur récupération. En règle
générale, la plupart d’entre eux optent
pour 3 ou 4 phases de sommeil d’1 à
2 heures et encore 2 ou 3 siestes plus
courtes pendant la journée, pour un
total d'environ 5 heures de sommeil.
Dans des conditions vraiment difficiles
de navigation ou en cas d'avarie, le
navigateur est alors suffisamment frais
pour rester en veille en ne s'octroyant
que quelques pauses de sommeil
(quelques minutes), réparties dans la
journée.
LA BONNE STRATÉGIE
Pour les marins professionnels, cette
approche est abordée de façon scien-
tifique, avec le concours de structures
expertes comme l’hôpital de l’Hôtel
Dieu,à Paris.La première des stratégies
à mettre en œuvre est de déterminer
individuellement les heures les plus
propices à l'endormissement, ce que
les spécialistes appellent les“portes du
sommeil”.Associées à cette approche,
des techniques de relaxation peuvent
aussi favoriser le raccourcissement de
© LAFABRIK STUDIO GRAPHIC
l'endormissement.également,le choix
des périodes de sommeil selon l'orga-
nisation chrono-biologique de l'orga-
nisme est judicieux.Ainsi, les périodes
de milieu et fin de nuit, et le début
d'après-midi sont idéales pour trouver
le sommeil. Les travaux de recherche
menés sur les courses au large ont
montré qu'il existe deux séquences
principales de sommeil fractionné.Les
périodes de sommeil de 15 à 30 min
sont de véritables “cycles en concen-
tré” qui permettent de recharger en
partie les accus sur le plan musculaire.
Les périodes d'1 h 30 à 2 h corres-
pondent au sommeil profond, dont le
cerveau a un besoin vital.Cette adap-
tation au sommeil fractionné s'effectue
en quelques jours.En revanche, au re-
tour sur terre,les coureurs mettent sou-
vent plusieurs semaines pour retrouver
leur sommeil monophasique nocturne.
Cela tend à prouver le bien-fondé des
théories expliquant que la survie des
premiers hommes n'a été possible
que grâce à un sommeil fractionné.Ce
n’est que lorsqu’il s’est débarrassé de
ses prédateurs que l'homme moderne
a pu jouir d’une seule période de som-
meil nocturne. En configuration de
course, les skippers retrouvent donc
une organisation de sommeil ances-
trale et primitive !
2 QUESTIONS À…
Luc Coquelin,
skipper.
Quels sont vos indicateurs
de fatigue ?
Je fais très attention à ne pas
me mettre “dans le rouge”.
Quand je relève des signes
de fatigue comme une baisse
de moral, des maladresses
dans les gestes courants de
manœuvre, je vais dormir un
peu, même si ce n'est que
10 minutes, pour recharger
les batteries. Je fais attention
à me réserver des moments
de sommeil un peu plus longs
(jusqu'à 2 heures), en privilé-
giant un certain confort : dor-
mir avec des vêtements secs
et bien calé pour ne pas avoir
à compenser musculairement
les mouvements du bateau
pendant le sommeil.
Comment faites-vous
pour aller dormir le plus
sereinement possible ?
Pour bien dormir, il faut avoir
confiance en son bateau,
avoir un réveil avec un volume
sonore très élevé pour être cer-
tain de se réveiller. Pour cela,
j'ai installé à bord un minuteur
de sèche-linge allant de 5 min
à 2 h sur une alarme de recul
de camion avec un interrupteur
qui m'oblige à me lever pour
l'arrêter ! En général, j'essaie
de privilégier les périodes de
sommeil le jour. En effet, les
voiliers ne sont pas très visibles
la nuit... et il est plus facile de
sortir de la couchette et réagir
rapidement de jour en cas de
situation d’urgence.