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juin - juillet 2016

anform !

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forme

Aux JOde Londres, David Hauss avait, auprès

de Laurent Vidal, un frère du triple effort qu'il

côtoyait depuis les rangs des juniors. Ensemble,

ils courent côte à côte pendant les 10 km de la

course à pied, rêvant l'un et l'autre de conqué-

rir la médaille de bronze de l'Anglais Jonathan

Browlee qui ne se trouve, à 2 km de l'arrivée,

qu'à 10 petites secondes d'eux. En vain, hélas. À

l’arrivée, David se classe 4

e

et Laurent 5

e

, Vincent

Luis, 11

e

, le meilleur résultat des tricolores de-

puis l’avènement du triathlon aux JOen 2000.

De cette amitié est née l'idée que Laurent Vidal

devienne l'entraîneur de David, dans sa quête

olympique. Mais le destin en a voulu autrement.

Son pote Laurent est brutalement décédé d'un

arrêt cardiaque, à 31 ans, en novembre 2015.

Un sacré choc.

“Je suis orphelin de Laurent”

, a

confié David, sous le coup de l'émotion.

“Je sais

qu'il me soutient de là-haut. Je sens une force

supplémentaire. Je me suis demandé comment

honorer sa mémoire. Un jour, j’ai trouvé logique

de signer àLiévin, le club de cœur de Laurent.

L’année des Jeux, ça a du sens. Et ce n'est pas

une affaire d'argent. Juste une affaire d’hommes.

Je veuxcontinuer ce qu’il a fait. Je ne le fais pas

pour lui, mais avec lui.”

Imaginez. 55 compétiteurs motivés

comme jamais pour la course de leur

vie. Seulement 3 médailles décernées

pour le triathlon masculin. Aucune

chance de se récupérer en s'alignant

sur une autre épreuve, comme les

nageurs ou les athlètes. Et parmi ces

55 triathlètes, David Hauss, fort de son

expérience, confiant, focalisé sur cette

médaille qu'il peut conquérir, après

1 h 45 de combat intense. Au moment

de s’aligner sous les ordres du starter,

sur la plage mythique de Copacabana,

il n’aura pas un regard pour les specta-

teurs venus assister à sa course. Il sera

dans sa bulle, centré sur les aspects

tactiques de sa course.

“Faire le job”

,

c’est-à-dire exécuter à la perfection son

plan, un point après l’autre. Au coup

de feu, partir très vite, mettre de la

fréquence dans sa nage pour se posi-

tionner immédiatement parmi les meil-

leurs. Éviter ainsi les coups et surtout,

pouvoir virer à la première bouée sans

être gêné, en restant en contact avec la

tête de course. Puis, à la sortie de l’eau,

faire une transition propre en attaquant

le vélo avec le groupe des leaders. . Sur

les 40 km de ce parcours vélo, il devra

être vigilant car il ya une côte très raide

à enchaîner à plusieurs reprises, oùdes

échappées peuvent se produire. Puis,

viendra le moment crucial d’aborder la

course à pied. C’est là que se jouera le

titre olympique. David sait qu’il sera à

la bagarre avec l’armada espagnole,

Javier Gomez, Mario Mola, en tête.

Qu’il aura son coéquipier Vincent Luis

Lors des championnats d'Europe par équipe, en juillet 2015, David prend le dernier relais pour

la France. Il est à la bagarre avec 2 adversaires au moment de poser son vélo. Il sait qu'il ne lui

reste que 1 640 mètres de course à pied pour faire la différence. Au culot, il prend la décision

géniale de partir... sans ses baskets. En faisant cela, il gagne 7 secondes sur ses 2 concurrents

immédiats qui chaussent les leurs. Il prend aussi le risque de se blesser les pieds sur le béton et

de devoir peut-être abandonner. 7 secondes, ce n’est quasiment rien. Mais sur un effort aussi

court, c'est 40mdans la vue de l'Anglais et du Suisse qui voient ses talons s'éloigner pour le titre.

Un coup au moral fatal.

“Venant de La Réunion, j’ai l’habitude de marcher pieds nus. Je suis un

ancien surfeur. C’est pour l’équipe de France que je l’ai fait”

, a-t-il précisé, au terme de sa course.

Il est plus rusé que ses adversaires

Il est profondément humain

Il est déterminé et perfectionniste

©

DAViDHAUSS.COM

© JANES M.SCHMiDt-itU MEDiA

© DELLY CARE_itU MEDiA

sans doute à ses côtés. Qu’il devra tout

donner pour aller enfin chercher cette

médaille, pour son pote Laurent Vidal,

pour son père qui le coache depuis ses

débuts et pour son île, La Réunion, qu’il

aime tant.