

février - mars 2016
•
anform !
57
nos
enfants
“Pourquoi papa et toi ne vous aimez plus ?”
La séparation de deux parents est toujours une secousse pour un enfant, une
menace morale et physique. Esquiver cette question le met en grande difficulté. Le
silence laisse place aux fantasmes d’une réconciliation ou de son propre rôle dans
l’origine de cette désunion. Et si ses parents se séparaient de lui ? Le danger est
ressenti comme bien réel pour lui et cette idée d’abandon l’épouvante quel que soit
son âge. Il s’agit donc toujours de le rassurer sur sa place d’enfant aimé des deux pa-
rents, de continuer le lien sécurisant malgré les changements de repères, la distance
et les divergences de vues. Lui dire ce qu’il est en mesure d’entendre, en restant au
plus proche de la vérité, c’est lui permettre de ne pas tomber dans le gouffre de ses
craintes, de ne pas être le grand oublié de cette histoire qui est aussi la sienne.
“Est-ce que je vais mourir papa ?”
Voilà de quoi faire chavirer l’assurance d’un père ! Et derrière
cette question se cache une foule d’autres interrogations.
Poser la question de sa propre mort est un possible détour-
nement pour parvenir à entendre une réponse qui lui fait si
peur :
“Pourrions-nous être séparés ?”
Car si la mort d’un
enfant a quelque chose d’impensable dans ce qu’elle a
de dramatique, l’idée qu’un enfant se fait de la mort d’un
parent est tout aussi terrifiante. En revanche, très rapidement
dans ses jeux, on peut entendre que l’idée de mort lui est
familière. Vous l’entendez dire à sa peluche préférée :
“Je
vais te tuer, aaah ! Je suis mort”
, tomber par terre et fermer
les yeux… Il joue alors à se familiariser avec l’absence, ou
avec ce qui ne bouge plus, en opposant ce qui vit et ce qui
est mort. Cette interpellation pouvant avoir pour origine le
décès d’un proche ou d’un animal aimé de l’enfant, il est
très important de consacrer un petit moment à l’écouter et à
lui parler tranquillement. Mais soyez très attentifs à ne jamais
mentir sur des notions aussi fondamentales, il en va de sa
confiance en vous, donc des fondements de sa sécurité.
“Mamie, c’est quoi un cancer ? ”
Ce petit garçon a bien entendu les adultes parler sur un ton très grave, très triste,
parfois chuchoté et en lui tournant le dos, de “cancer”. Mais parce que tout le monde
semble fuir lorsqu’il pose cette question, il s’adresse à celle qui sait tant de choses.
Mamie qui n’a pas la langue dans sa poche d’habitude, après un silence gêné,
décide de lui répondre. “
C’est le nom d’une maladie. Une maladie qui se soigne. Ton
papa est fatigué mais il est fort et courageux, il va se battre contre elle”. “Tu crois qu’il
va gagner ?” “Personne ne le sait mais le médecin s’occupe bien de lui”.
L’enfant
ne se sent pas trahi, sa mamie lui a dit la vérité, simplement, posément. Digne de sa
confiance, il va pouvoir cheminer vers la tristesse ou la colère, en espérant que ses
autres questions trouvent aussi une réponse, sans quoi l’angoisse, la culpabilité, et
l’éventuel traumatisme du décès de son père se cristalliseront en symptômes bien
plus compliqués à interpréter à l’adolescence ou à l’âge adulte !
Les attentats
expliqués
aux enfants
Seule la franchise paie. Les
moins de 6 ans doivent être
protégés des images, mais
il faut en parler avec eux.
D’autant qu’ils en entendent
forcément parler et qu’ils res-
sentent l’angoisse des pa-
rents. On peut leur expliquer
que le monde est en dan-
ger, en restant simple et en
résumant les principaux faits.
Pour trouver les mots, remé-
morez-vous ce qui vous faisait
peur à leur âge. Ensuite, il
faut les rassurer, leur dire que
les adultes sont là pour les
protéger quoi qu’il arrive. Dès
6 ans, on peut donner une
explication plus complexe
mais avec des réponses fac-
tuelles. On peut faire réfé-
rence à ce qu’ils connaissent,
la violence d’un jeu vidéo par
exemple. Parler avec eux, leur
proposer de dessiner ce qu’ils
ont compris, d’écrire un texte,
une chanson…