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mars - avril 2015

anform !

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psycho

n’osent pas quitter le foyer.Elles y ont

leurs repères et craignent de tout perdre.

Elles ont peur du lendemain, peur de

porter plainte, peur des représailles,

ne savent pas comment subvenir aux

besoins des enfants.Il y a aussi la pres-

sion de la famille et de la religion, très

présente notamment chez les femmes

de 50 ans.”

Elles ont besoin d’être

écoutées, informées sur leurs droits et

accompagnées dans leurs démarches.

Elles trouveront ensuite une aide

psychologique, indispensable à leur

reconstruction.

“Les violences psycho-

logiques notamment, peuvent laisser

des séquelles irréparables si elles ne

sont pas traitées”

, alerte Sonia Tounsi,

psychologue clinicienne.

“Les consé-

quences de cette violence chronique

et insidieuse varient d’une personne

à l’autre, du vécu intime de chacune,

de son niveau de fragilité,d’isolement,

de distanciation.En plus de la blessure

narcissique repérable dans la majorité

des situations,on trouve une variétéde

symptômes d’un état dépressif et/ou

anxieux et l’existence d’une mémoire

traumatique (sentiment d’insécurité,

vision négative de l’avenir, ressasse-

ment, hypervigilance…

”Le travail psy-

chothérapique permet

“de les aider à

exprimer la honte, la culpabilité, la co-

lère,mais aussi les sentiments ambiva-

lents de haine et d’amour envers leurs

conjoints.Il s’agira, au fil des séances,

de les aider à se dégager d’un état

de sidération qui fige les émotions,

la pensée, les souvenirs, le rapport à

l’autre. Cela permettra de revenir à

l’histoire personnelle et d’essayer de

comprendre comment la personne

est entrée dans ce type de relation

destructrice.Comment elle s’est sura-

daptée”.

rESTAUrEr SON ImAgE

À l’association, elles peuvent se

détendre dans un espace couvert

donnant sur une petite cour, partager

une boisson chaude… Rompre avec

l’isolement. Être écoutées sans être

jugées. Une fois par semaine, elles

peuvent assister à des groupes de

parole. Objectif : bénéficier du sou-

tien et de l’expérience des autres.

“J’ai décidé d’arrêter

de pardonner”

Après 15 ans de vie com-

mune, le bonheur a peu à

peu laissé place à la violence

physique et morale. Un

jour, j’ai décidé d’arrêter de

pardonner. C’est l’assistante

sociale du quartier et la gen-

darmerie qui m’ont orientée

vers l’association Forces.

C’était il y a 1 an. Là, ils m’ont

aidée à me détacher de mon

compagnon, à trouver des

solutions financières aussi, car

j’ai 3 enfants (de 6, 3 et 1 an).

Ils ont beaucoup souffert.

Et je suis seule. Pas d’amis

(beaucoup n’ont pas voulu

prendre parti), peu de soutien

familial. Aujourd’hui, je suis

toujours suivie par la psycho-

logue, 2 fois par semaine. J’ai

parfois des coups de blues.

On n’oublie pas quelqu’un

du jour au lendemain. Nous

sommes en cours de procé-

dure pour garde partagée. Ça

prend du temps. Mais je tiens

bon. Je suis obligée, pour

les enfants. Et puis, je me dis

qu’il y a pire que moi et j’aide

d’autres femmes victimes

de violences. L’association

m’encourage pour passer

une formation et reprendre

le travail. Ils m’aident à

m’organiser. Quant à “refaire

ma vie”, pour l’instant je ne

l’envisage pas. La confiance,

ça va prendre du temps. Mais

il ne faut jamais dire jamais.

Julienne, 33 ans

•••