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anform !
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mars - avril 2015
Petites confidences
à ma psy
Huguette,
La question que vous vous posez
est effectivement "de poids" :
continuer à garder un secret qui,
certes, vous concerne directement,
mais qui a été mis en place non pas
par vous mais par votre mère ! Ce
que je retiens tout d'abord c'est
qu'une partie de vous a le désir
de partager cela avec vos enfants.
Ce désir me semble tout à fait
intéressant et renvoie, selon moi, à
un désir de réparer la petite fille que
vous étiez et qui a justement été
privée d'une part de son histoire.
Il y a également une autre part de
vous qui s'interroge sur l'utilité de le
dire à vos enfants, avec la peur de
les encombrer avec cette informa-
tion. Chercher à partager ce poids
ne me semble pas opportun. Je
vous invite à creuser plus profon-
dément la question de la nécessité
que vous avez de partager avec
eux ce secret ? Au départ, c'est
votre mère qui a fait de cette part
de votre histoire un secret : pour
quelle raison ? Vraisemblablement,
pour se protéger elle-même ! Vous
n'êtes plus obligée, Huguette, de
continuer à jouer sur le registre du
secret ! Comme vous le dites, c'est
votre histoire, il vous appartient
donc aujourd'hui d'en disposer
ou d’en parler comme bon vous
semble. Si vous souhaitez en parler
avec vos enfants, libre à vous. Mais
pour sortir de cette position subie
depuis votre enfance, il est plus que
temps de vous réapproprier ce fait
et de ne plus l'évoquer en terme
de poids. Autrement dit, il serait
intéressant que ce secret ne soit
plus pesant pour vous-même mais
qu'il redevienne une information
qui vous concerne et que vous serez
libre de partager avec les personnes
adéquates.
Dois-je révéler ce secret
à mes enfants ?
Cela fait 35 ans que je vis avec un secret de famille. Mon père n’est pas mon père biologique. Je l’ai appris par accident,
dans une fête de famille bien arrosée. Ils n’ont pas fait attention à ma présence et la vérité a été dite. À l’époque, j’ai
discuté avec ma mère qui m’a fait promettre de ne rien dire. Aujourd’hui, maman est morte. Cette nouvelle me pèse sur
le cœur. Surtout par rapport à mes frères et ma sœur que j’aime beaucoup. Est-ce que cela changerait quelque chose ?
Mon père, lui, a accepté de faire comme si j’étais sa fille et, dans la réalité, je suis sa fille. Car, de mon père biologique,
je ne sais rien. Aujourd’hui, j’ai des enfants et je me demande s’il faut leur dire et partager ce poids. D’une certaine façon
cela fait partie de leur histoire aussi. Mais à quoi bon les encombrer avec cette information ?
Huguette, Guyane
Par Sandrine Dagnaux,
psychothérapeute