novembre - décembre 2014
•
anform !
55
Dossier
“Je devais me marier, j’avais 25ans. Mais, deuxsemaines avant
le jour J, je me suis fait larguer. Deuxans de déprime ont suivi. Et
un jour, j’ai décidé que plus rien venant des hommes ne m’attein-
drait. C’était ma seule façon, selon moi, de remonter la pente. J’ai
commencé, un peu comme une vengeance, un jeu malsain, à
collectionner les relations d’un soir. Cela m’a apaisée, donné une
impression de toute-puissance pendant quelques années. On vit à
une époque oùc’est super facile de passer à l’acte, avec les sites de
rencontre en ligne, les chats, les webcams… Jusqu’au jour oùj’ai
réalisé que je ne pouvais plus m’en passer. J’ai essayé de diminuer
mais ça me rendait très agressive. J’ai même pris des anxiolytiques.
Je suis tombée amoureuse, il y a 5ans. Une belle histoire avec
un projet de vie commune et de bébé. Mais ça n’a pas tenu car je
voyais des hommes en dehors. J’avais beau expliquer que ce n’était
que sexuel, il ne l’a pas accepté. Et je comprends. D’ailleurs, on
reste amis. Il m’est arrivé d’avoir une dizaine d’hommes en même
temps. Ça me dégoûte un peu parfois et, en même temps, j’ai
encore le sentiment de vivre plus fort. Et surtout de me venger de
tout ce qu’on m’a fait. J’ai essayé d’en parler à un psy qui travaille
sur le comportement, mais j’ai arrêté au bout de quelques séances.
Je ne suis pas prête à vivre autrement. En fait, pour être honnête,
c’est le regard des autres qui me gêne. Mais au fond, je m’accepte
comme je suis. Il faut juste que je fasse une croixsur la vie à deux.”
L’AVIS DE LA PSY
“Pour Marina, à mes yeux ce n’est
pas une addiction mais un deuil qui
n’a pas été réalisé. Aujourd’hui, elle
est insérée socialement, elle s’ac-
cepte telle qu’elle est, elle connaît
les conséquences de ses actes et
se protège sexuellement. Le vrai
souci à mon sens est l’image qu’elle
a d’elle-même… Mais, comme elle
le dit très bien, cette image est
faussée par ce que lui renvoient les
autres. En parler dans un collectif
pourrait sans doute l’aider.”
Marina, 35 ans,
sex-addict
“J’avais beau expliquer
que ce n’était que sexuel,
il ne l’a pas accepté.”
© ISTOCKPHOTO