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anform !

novembre - décembre 2014

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2 QUESTIONS À…

Rekha Malton,

psychologue clinicienne

Rencontrez-vous beaucoup

d’enfants précoces en situation

difficile ?

De plus en plus. Ce sont

des enfants qui ont du mal

à respecter les règles de la

société. Des enfants sensibles

(la précocité rend l’enfant

sensible aux disfonctionnements

familiaux. Il est très affecté par

les conflits), souvent anxieux

(notamment face à la maladie,

la mort, la sexualité), hyperactifs

et peuvent présenter des

difficultés motrices. Ils ont des

problèmes relationnels avec les

autres enfants (car en décalage)

et recherchent la compagnie

d’enfants plus âgés ou des

adultes. Une de mes patientes,

une petite fille de 10 ans,

présente d’excellents résultats

aux tests de quotient intellectuel.

Pourtant à l’école, elle est en

échec scolaire. Elle s’isole, n’a

pas d’amis, est en conflit avec

les enseignants. Elle ne veut plus

aller à l’école.

Que peuvent faire les parents ?

Les parents sont souvent

désemparés. D’autant que

les enfants précoces sont la

plupart du temps ingérables

à la maison, prennent toute la

place, veulent tout maîtriser. Il

faut qu’ils soient identifiés. De

4 à 6 ans, on leur fait passer des

tests psychotechniques et, de 6

à 16 ans, des tests de QI. Il est

important qu’ils soient suivis par

un psychologue. Les parents

pourront participer à des groupes

de parole.

Et à la maison, comment

ça se passe ?

Ils peuvent être en révolte, désobéis-

sants, autoritaires. Avec les frères et

sœurs, il peut yavoir des conflits, mais

il existe une hypothèse génétique

selon laquelle lorsqu’il y a un enfant

précoce dans une famille, les chances

que ses parents, ses frères et sœurs le

soient aussi sont élevées.

Quel est le rôle

de l’entourage ?

C’est aux parents, enseignants et

spécialistes, de créer les meilleures

conditions pour qu’ils puissent se

développer harmonieusement. Les

parents doivent prendre le temps,

être patients, faire attention à ce qu’ils

disent (les EIP sont très sensibles à

l’injustice), discuter avec eux, instau-

rer des rituels (repas en famille…). Le

rôle de l’enseignant sera d’être attentif

aux indices susceptibles d’être liés à

la précocité afin d’éviter exclusion et

souffrance chez l’élève.

Faut-il pour autant

les placer dans des classes

spécialisées ?

Certains pensent qu’il est bon de les

“ghettoïser”. Il existe des écoles de

ce type où les enfants sont très bien

pris en charge. Tout se passe très bien

jusqu'à ce qu’ils se retrouvent dans la

vraie vie… Nous avons proposé aux

rectorats de Guadeloupe, de Marti-

nique et de Guyane, le regroupement

des EIP dans des établissements

“normaux”. Il s’agit de les placer avec

d’autres enfants (le taux d’EIP dans

une classe ne devant pas dépasser les

deux tiers)et des enseignants sensibi-

lisés, qui respectent leurs rythmes, ap-

profondissent avec eux les sujets abor-

dés. Pour le collège et le lycée, nous

avons proposé de les insérer dans des

classes habituellement dédiées aux

sportifs de haut niveau, des classes

aux emplois du temps adaptés.Quand

les autres feront du sport, ils auront

des activités spécifiques. Ces proposi-

tions sont actuellement à l’étude.

Quelles spécificités

aux Antilles-Guyane ?

Chez nous, les enfants précoces

n’ont pas accès à un volume suffisant

d’information, de structures (musées,

centres scientifiques et technolo-

giques…). Un enfant passionné d’art,

d’archéologie ou de technologie aura

du mal à aller plus loin. De plus, par

manque d'information, la précocité in-

tellectuelle est un problème largement

sous-estimé.