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anform !
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mars - avril 2016
Faux-amis
L’amitié au travail,
c’est possible ?
L’amitié sur le
lieu de travail,
c’est possible et
ça existe. Mais
elle est souvent
complexe, oblige
à mettre en place
des mécanismes
particuliers, et
peut être parfois
décevante.
PAR MARIE-FRANCE GRUGEAUX-ETNA
psycho
V
irginie est hôtesse de
l’air pour la même
compagnie
depuis
des années. Un métier
passionnant mais qui l’oblige àévo-
luer dans un espace très confiné, à
dormir dans des hôtels, aux côtés
de ses collègues. Pourtant, elle a
décidé que jamais plus elle ne se
lierait d’amitié sur son lieu de tra-
vail. Pourquoi ?
AMITIÉS SANS LENDEMAIN
“L’amitié se construit progressi-
vement. Au travail, on se voit tous
les jours. Inévitablement, cette
promiscuité oblige à s’intéresser à
l’autre. Et, avec le temps, les dis-
cussions superficielles muent vers
des propos plus personnels, voire
confidentiels.”
Virginie a aujourd’hui
42 ans.
“J’ai déjà connu des “ami-
tiés professionnelles” qui se sont
arrêtées brusquement sans raison,
pour recommencer et s’interrompre
à nouveau. Je me suis investie dans
des relations qui se sont finalement
effritées, comme s’il y avait une
durée de vie limitée pour l’amitié.”
Virginie est persuadée que ses rela-
tions d’amitié chaotiques sont avant
tout liées au milieu dans lequel elle
évolue.
“Dans ce tout petit milieu,
il y a beaucoup de gens qui trans-
forment ou interprètent les propos
d’autrui. Paradoxalement, ce sont
toutes ces histoires qui animent la
vie du personnel navigant, quand
on ne parle pas boulot bien sûr. Je
me suis retrouvée au centre de polé-
miques sans comprendre pourquoi.
J’ai décidé de m’en protéger.”
Les
vrais amis de Virginie sont à l’exté-
rieur. Avec eux, elle parle sans rete-
nue, sans craindre que ses propos
ne soient déformés ou répétés. Elle
se contente de relations cordiales
avec ses collègues.
“Et je ne souffre
plus. Je fais désormais le distinguo
entre travail et vie personnelle. Et
même si certains de mes collègues
ont ma préférence, je ne les vois
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