

septembre - octobre 2015
•
anform !
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Cela veut-il dire qu’une prise
en charge précoce peut éviter
aux jeunes d’entrer dans la
schizophrénie ?
Hélas, non. On évitera surtout que des
jeunes entendent des voix pendant 1
ou 2 ans avant de pouvoir en parler à
quelqu’un et de recevoir un traitement
adapté. L’aide psychologique est tou-
jours capitale. Au terme de leur prise
en charge, les jeunes malades auront
bénéficié d’un début de maladie en
douceur. Ils auront eu des explica-
tions et un soutien psychologique au
fur et àmesure de leur entrée dans la
maladie. Cela permet d’instaurer dès
le début un climat de confiance avec
le malade et d’éviter le recours à la
contrainte.
Ne craignez-vous pas de
“psychiatriser” des jeunes qui
traversent une période difficile ?
Au contraire. Psychiatriser, c’est
enfermer dans un diagnostic, des
contraintes, des a priori. C’est la voie
du silence, de la stigmatisation et de
l’exclusion. Nous ne voulons pas de
ça. Nous voulons soigner pour éviter
l’entrée dans la schizophrénie. Il faut
prendre le temps d’apprécier l’évo-
lution avant d’orienter le jeune. Il est
vrai que la durée du traitement prescrit
pour de “petits signes de schizophré-
nie” n’est pas codifiée et doit donc se
décider au cas par cas, toujours dans
l’alliance avec le malade et sa famille.
Comment aider les parents à
détecter les premiers signes ?
Les parents doivent être vigilants
lorsqu’un adolescent va mal psycho-
logiquement. Il se met àchanger de
comportement. Il s’isole, décroche,
devient bizarre, ne sort plus ou ne
rentre plus àla maison, tient des pro-
pos qui “ne sont pas lui”, des propos
mystiques, décousus. On lui en veut,
il a des projets étranges, ou plus de
projet du tout. Il est surexcité, ou dé-
primé, ou semble n’avoir plus aucun
sentiment... On ne le sait pas tout de
suite, mais le malade peut commen-
cer àsouffrir en entendant des voix,
en n’étant plus capable d’organiser
ses pensées et de raisonner comme
avant, de percevoir et d’interpré-
ter la réalité rationnellement. Cela
explique son retrait. Mais la schizo-
phrénie n’est pas un diagnostic que
les parents peuvent porter seuls.
L’ado peut être déprimé, peut s’être
mis àla drogue… Ils doivent consul-
ter de préférence leur généraliste.
Les généralistes ont-ils un rôle
majeur à jouer ?
Il faut que le généraliste soit au cœur
de la prise en charge dès le début.
D’abord pour un dépistage précoce,
ensuite àchaque fois que le patient
rompt ou est tenté de rompre ses
soins, et pour la réhabilitation. Les gé-
néralistes ont donc besoin d’être plus
informés au sujet de la schizophrénie
afin de repérer les symptômes évoca-
teurs d’une entrée dans la psychose.
En Guadeloupe, une campagne
d’information sera menée dès sep-
tembre avec le soutien de l’ARS et de
l’Ireps. Il faut aussi que la population,
les travailleurs sociaux et les adultes
relais (animateurs sportifs, leaders
associatifs, religieux…) et, bien sûr,
les paramédicaux sachent repérer un
adolescent qui “va mal”.
psycho
© IStockPhoto
Une consultation
de dépistage
au CHU
Le chU de Pointe-
à-Pitre / Les Abymes
propose une consultation
gratuite de dépistage et
d’accès au soin précoce
de la schizophrénie.
objectif : soigner dès les
premiers signes, en syner-
gie avec les autres acteurs
de la santé mentale.
Voici la marche à suivre.
1
Le généraliste adresse
un mail ou appelle les
médecins de la consulta-
tion du chU.
2
ceux-ci contactent di-
rectement la famille pour
fixer un rendez-vous.
3
La première consulta-
tion est effectuée par les
docteurs Doressamy et
Scheider. Ils en rendent
compte au généraliste.
4
Le suivi peut se prolon-
ger quelque temps.
5
Si la maladie est confir-
mée, le malade et sa
famille sont orientés après
un début de suivi et de
traitement vers l’équipe
de soin psychiatrique du
centre médico-psycholo-
gique de leur commune
(cMP).
6
Si la maladie n’est pas
confirmée, le patient et sa
famille sont réorientés.