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anform !
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février - mars 2017
loppement cérébral des enfants.
Ils ont confirmé les conclusions de
Michel Serres. Le numérique est,
en effet, un bond cognitif pour ses
utilisateurs. Leur cerveau n’est pas
différent, mais il est utilisé différem-
ment. Dans une étude publiée en
2015, le chercheur Olivier Houdé
parle de “TGV cognitif” qui envoie
les informations de l’écran collec-
tées par l’œil directement vers le
pouce qui navigue sur l’écran. Ce
système mobilise le cortex pré-
frontal qui améliore la rapidité de
décision en lien avec les émotions.
En revanche, il inhibe la partie du
cerveau qui gère la prise de recul
et la résistance cognitive. Les temps
de réaction sont bien plus lents. Par
extension, les enfants du numérique
ont une toute nouvelle gestion du
temps, tributaire du temps de char-
gement d’une page web ou d’une
application. Cette gestion des infor-
mations explique pourquoi la lecture
est différente, “bondissante” pour
saisir rapidement les informations
qui paraissent importantes.
UTILISATION
ÉQUILIBRÉE
En revanche, trop sollici-
tée, cette capacité peut, en
effet, se muer en trouble
cognitif et provoquer des
troubles de l’attention,
la prise de décisions ab-
surdes, parfois collectives
et une certaine impulsivité.
La solution d’Olivier Houdé
est d’enseigner aux enfants
à résister. Les entraîner, à
l’école notamment, à remettre en
service la partie du cerveau qui
gère le contrôle cognitif par le rai-
sonnement, la catégorisation, pour
apprendre au cerveau à résister “à
sa propre déraison”. De danger, le
numérique qui est inévitable doit
tout simplement faire l’objet d’un
apprentissage et d’une utilisation
équilibrée entre le cortex préfrontal
et les autres parties cérébrales. Cer-
taines études proscrivent l’utilisation
du numérique dans certaines condi-
tions. Si les développeurs Web
de la Silicon Valley, eux-mêmes,
tiennent leurs petits en dehors
des écrans, c’est parce qu’il
a été prouvé que l’exposition
aux écrans des enfants entre
la naissance et l’âge de 6 ans
provoque des troubles cognitifs
importants, voire majeurs. Les
conséquences : des troubles
moteurs, une défaillance cognitive
(l’enfant ne réagit plus aux stimulus
de son environnement comme il le
devrait mais uniquement à ceux de
l’écran), et des troubles du langage.
D’autre part, une étude norvégienne
appelle à la limitation de l’utilisation
des appareils dans une journée. Des
adolescents exposés à plus de 4 ap-
pareils différents dans la journée
s’exposent à des troubles du som-
meil. Alors qu’ils devraient dormir 7
à 8 h pour être opérationnels, ils ne
dorment que 5 h. Le risque devient
avéré quand l’utilisation de l’écran
se fait 1 h avant d’aller au lit. Elle
retarde le moment de l’endormisse-
ment et favorise un sommeil agité.
ÀTaïwan, par exemple, le parlement
a voté une amende pouvant aller
jusqu’à 1400 euros pour les parents
qui laissent les enfants abuser des
écrans et objets connectés !
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