

février - mars 2015
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anform !
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L
e village de Trois-Sauts en
Guyane est isolé en amont
du fleuve Oyapock. Ses
450 habitants amérindiens y
vivent de manière traditionnelle. Pour-
tant, en 2006, une analyse montrait
que 8 % des bactéries
Escherichia
coli
excrétées dans leurs selles étaient
résistantes aux céphalosporines de
3
ème
génération. La prescription de
cet antibiotique a été limitée et, en
2010, laproportion debactéries résis-
tantes est passée à 5,2 %. À l'heure
où l'Agence du médicament tire la
sonnette d'alarme, en constatant que
la résistance bactérienne continue de
progresser, cet exemple démontre que
les efforts peuvent payer.
aNtIBIOtHérapIe
Une lutte essentielle. Car c'est bien à
l'introduction des antibiotiques dans
notre pharmacopée que nous devons
unegrandepartiede l'améliorationde
notre santé depuis les années 1950.
En tuant ouenempêchant ledévelop-
pement de bactéries pathogènes, ces
médicaments ont permis desoigner de
nombreuses maladies parfois consi-
dérées comme incurables (dysenterie
bactérienne, fièvre typhoïde, lèpre,
peste, tuberculose, typhus, choléra,
syphilis…). Dans les années 1970, on
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pensait même qu'ils permettraient de
venir àbout des maladies infectieuses.
Ils furent donc utilisés de manière
massive, parfois sur des personnes en
pleine santé à titre préventif. Les ani-
mauxdomestiques et d'élevageont été
mis eux aussi au régime antibiotique.
Non seulement ils les protègent des
maladies mais, en plus, ils accélèrent
lacroissancedubétail.
résIstaNCe Des BaCtérIes
Pourtant,unpeupartoutdanslemonde,
les preuves d'une baisse d'efficacité
des antibiotiques se sont accumulées.
La pénicilline combat de moins en
moins bienles pneumocoques, respon-
sables de pneumopathies, de ménin-
gites et d'otites. ÀParis, près delamoi-
tiédes otites récidivantes del'enfant ne
peuvent plus être traitées par cet anti-
biotique. De nombreuses souches de
© HEMERA
question d'actu
staphylocoquedoré, àl'origined'abcès
ou de septicémies, ne semblent plus
empoisonnées par les antibiotiques
classiques. Les entérocoques, des bac-
téries présentes normalement dans l'in-
testin pouvant aussi causer de graves
endocardites et septicémies, nonplus.
Selon un communiqué de l'Agence
nationale de sécurité du médicament
(ANSM) publié en novembre dernier,
plus de 25 000 personnes décèdent
chaque année en Europe àcause des
résistances développées par les bacté-
ries. Car si les antibiotiques s'avèrent
moins efficaces, c'est queles bactéries
ont appris às'en protéger en dévelop-
pant des résistances. Comment font-
elles ? Les résistances apparaissent au
hasarddesmutations, oudeséchanges
de gènes qui se produisent entre les
bactéries. Lehasardfait qu'il arriveque
ces mutations empêchent un antibio-