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anform !

janvier - février 2015

© stockbYte

une proie si facile. J’ai un flair

exceptionnel pour la repérer. Elle

a besoin d’amour et de reconnais-

sance. Je vaism’attacher àcombler

ses manques, entrer dans ses fan-

tasmes. Lui dire qu’elle est belle,

que plus rien ne compte sauf elle.

Je peux aussi me faire passer pour

vulnérable, prendre une mine de

chienbattu. Et attirer dansmes filets

la femme maternelle, dévouée,

la sauveuse. Très vite, elle tombe

amoureuse. Un amour irrationnel,

total. Elle est rapidement persua-

dée qu’elle ne peut plus vivre ni

respirer sans moi. Elle est fascinée.

J’en profite pour l’éloigner de son

entourage qui ne lui apporte rien.

De façon insidieuse, je commence

montravail de sape. Petites phrases

assassines, culpabilisation, dévalo-

risation, messages contradictoires,

sous-entendus… Je sème le doute

dans sonesprit avec délectation. Je

prêche le fauxpour savoir le vrai. Je

lui assène que tout ce qui arrive est

•••

J’ai vécu 7 ans avec un pervers

narcissique. il était très intelli-

gent, très beau, très sportif. Je

suis tombée amoureuse de lui.

il faut dire qu’il a tout mis en

œuvre pour me séduire. il a per-

çu en moi la fragilité (j’étais en

deuil, je venais de perdre le père

de ma fille). ses petites phrases

dévalorisantes sont longtemps

passées inaperçues. il me répé-

tait : “tu es complètement folle”

ou “tu es matérialiste”. c’était

dit avec tellement de douceur

que j’ai réellement commencé

à me poser des questions. puis,

je me suis mise à déprimer, à

perdre pied. il plaçait la barre de

plus en plus haut pour que je ne

puisse jamais l’atteindre. Quand

il s’est senti en danger, il a été

plus loin et m’a fait passer pour

folle. il a même porté plainte

contre moi pour harcèlement.

J’ai fini en psychiatrie à la cli-

nique de l’espérance. il était ravi.

Grâce à une psychothérapie,

j’ai fini par m’en rendre compte.

J’ai compris qu’il était vide et se

nourrissait des autres, comme

un vampire. J’étais sa bouée de

sauvetage. il n’a pas eu de père.

et sa mère, infirmière, travaillait

de nuit. il s’est construit seul. il

a beaucoup manqué d’amour.

alors, dans son schéma, c’est lui

la victime.

barbara, 43 ans

“Il m’a fait passer

pour folle”

de sa faute, retournant habilement

les situations. Unhomme laregarde

dans la rue, elle a forcément tout

fait pour attirer son regard. C’est

de sa faute si je l’ai trompée... De

toute façon, je suis incapable de me

remettre enquestion. Je suis dénué

de sentiment, d’empathie pour ma

victime. Elle est mon objet, mama-

rionnette.

IMPRÉVISIBLE

Et si mavictime montrait des signes

de résistance, je pourrais devenir

dangereux. Car quand je me sens

en danger, je suis imprévisible.

Je la pousserais dans ses retran-

chements, n’hésitant pas à créer

des mises en scène, àexercer une

pression grandissante. Je viendrais

l’attendre à la sortie du travail, lui

téléphonerais jour et nuit, lamena-

cerais. Je lapousserais àladépres-

sion, à la folie, au suicide même.

Et partirais enquête d’une nouvelle

proie.