

janvier - février 2016
•
anform !
83
nos
enfants
“Pourquoi papa et toi ne vous aimez plus ?”
La séparation de deux parents est toujours une secousse pour un enfant, une
menace morale et physique. Esquiver cette question le met en grande difficulté. Le
silence laisse place aux fantasmes d’une réconciliation ou de son propre rôle dans
l’origine de cette désunion. Et si ses parents se séparaient de lui ? Le danger est
ressenti comme bien réel pour lui et cette idée d’abandon l’épouvante quel que
soit son âge. Il s’agit donc toujours de le rassurer sur sa place d’enfant aimé des
deux parents, de continuer le lien sécurisant malgré les changements de repères,
la distance et les divergences de vues. Lui dire ce qu’il est en mesure d’entendre,
en restant au plus proche de la vérité, c’est lui permettre de ne pas tomber dans
le gouffre de ses craintes, de ne pas être le grand oublié de cette histoire qui est
aussi la sienne.
“Est-ce que je vais mourir papa ?”
Voilà de quoi faire chavirer l’assurance d’un père ! Et derrière cette question
se cache une foule d’autres interrogations. Poser la question de sa propre
mort est un possible détournement pour parvenir à entendre une réponse
qui lui fait si peur :
“Pourrions-nous être séparés ?”
Car si la mort d’un
enfant a quelque chose d’impensable dans ce qu’elle a de dramatique,
l’idée qu’un enfant se fait de la mort d’un parent est tout aussi terrifiante.
En revanche, très rapidement dans ses jeux, on peut entendre que l’idée de
mort lui est familière. Vous l’entendez dire à sa peluche préférée :
“Je vais te
tuer, aaah ! Je suis mort”
, tomber par terre et fermer les yeux… Il joue alors
à se familiariser avec l’absence, ou avec ce qui ne bouge plus, en opposant
ce qui vit et ce qui est mort. Cette interpellation pouvant avoir pour origine
le décès d’un proche ou d’un animal aimé de l’enfant, il est très important
de consacrer un petit moment à l’écouter et à lui parler tranquillement. Mais
soyez très attentifs à ne jamais mentir sur des notions aussi fondamentales,
il en va de sa confiance en vous, donc des fondements de sa sécurité.
“Mamie, c’est quoi un cancer ? ”
Ce petit garçon a bien entendu les adultes parler sur un ton très grave, très triste,
parfois chuchoté et en lui tournant le dos, de “cancer”. Mais parce que tout le
monde semble fuir lorsqu’il pose cette question, il s’adresse à celle qui sait tant de
choses. Mamie qui n’a pas la langue dans sa poche d’habitude, après un silence
gêné, décide de lui répondre. “
C’est le nomd’une maladie. Une maladie qui se
soigne. Ton papa est fatigué mais il est fort et courageux, il va se battre contre
elle”. “Tu crois qu’il va gagner ?”“Personne ne le sait mais le médecin s’occupe
bien de lui”.
L’enfant ne se sent pas trahi, sa mamie lui a dit la vérité, simplement,
posément. Digne de sa confiance, il va pouvoir cheminer vers la tristesse ou la
colère, en espérant que ses autres questions trouvent aussi une réponse, sans
quoi l’angoisse, la culpabilité, et l’éventuel traumatisme du décès de son père se
cristalliseront en symptômes bien plus compliqués à interpréter à l’adolescence
ou à l’âge adulte !
Les attentats
expliqués aux enfants
Seule la franchise paie. Les
moins de 6 ans doivent être
protégés des images, mais
il faut en parler avec eux.
D’autant qu’ils en entendent
forcément parler et qu’ils
ressentent l’angoisse des
parents. On peut leur expli-
quer que le monde est en
danger, en restant simple et
en résumant les principaux
faits. Pour trouver les mots,
remémorez-vous ce qui
vous faisait peur à leur âge.
Ensuite, il faut les rassurer,
leur dire que les adultes sont
là pour les protéger quoi
qu’il arrive. Dès 6 ans, on
peut donner une explication
plus complexe mais avec des
réponses factuelles. On peut
faire référence à ce qu’ils
connaissent, la violence
d’un jeu vidéo par exemple.
Parler avec eux, leur propo-
ser de dessiner ce qu’ils ont
compris, d’écrire un texte,
une chanson…