ANFORM GUADELOUPE N76

janvier - février 2018 • anform ! 75 © ISTOCKPHOTO Ce n’est que lorsque l’enfant ne fait rien qu’il peut rêver. “Une occasion d’observer autrement ce qui nous entoure, ou de nous évader en laissant nos pensées vagabonder” , apprécie Catherine Rascle. Un moment précieux où l’es- prit s’en va. Un temps oùil va pouvoir puiser dans un pays propre àlui.Regarder la pluie tomber, observer les fourmis, n’est pas une perte de temps, c’est aussi s’imprégner du monde existant, ralentir et savourer le temps, sans précipi- tation ni obligations. Une forme de liberté oùles rêves, les désirs, les idées, les découvertes et les aspirations person- nelles se forment petit àpetit.Laisser les choses venir àsoi, être en état de réception et s’ouvrir àla créativité. Car il faut de l’inventivité pour mettre fin àl’ennui ! L’ennui est si… ennuyeux ! Si nous ne les aidons pas et si nous ne leur proposons pas d’écrans-masques, “les enfants ont la faculté d’être créatifs pour meubler des moments de désœuvrement, en jouant spontanément, par exemple” , analyse Catherine Rascle. Ceux àqui on aura permis de se débrouiller seuls pourront plus facilement faire preuve d’imagination. Ceux qui n’acceptent pas ou ne savent pas gérer la sen- sation d’ennui, “ ressentiront un vide insupportable lorsqu’ils ne seront pas occupés. Ce sont souvent des enfants en mouvement perpétuel, incapables de fixer leur attention sur leurs pensées. Cela peut être le cas pour les adolescents et les adultes au parcours de vie fragilisé. Ils ne supporteront pas de se retrouver face à “rien”, face à eux-mêmes”, note la pédopsychiatre. C’est pourquoi dans un premier temps, nous pouvons les aider àcréer leur espace imagi- naire, en mettant à leur disposition du matériel créatif, des jeux, des livres, des feuilles, des feutres, etc. En apprenant à gérer l’ennui, un enfant apprend à déterminer seul ce qu’il a envie de faire. Sans interfé- rences parentales, il peut développer confiance et estime de soi. Mieux, il y expérimente la solitude. “Ne pas avoir besoin de vaquer à une occu- pation est même un signe de bonne santé mentale. L’enfant y apprend la solitude sans en avoir peur. Plus tard, à condition que l’ennui ne soit pas omniprésent, on peut même considé- rer qu’il contribue au travail psychique inhérent au processus d’adolescence, en lui permettant de se confronter à sonmonde intérieur. Il y développe un sentiment d’indépendance, son sens critique et construit son sentiment d’identité”, assure la spécialiste. 2 Être inventif et autonome 3 Observer le monde Mais il ne s’agit pas de se complaire dans l’ennui ! Il y a une juste dose. Un enfant ou un ado s’ennuyant tout le temps “peut traduire une tendance anxieuse, souvent dans le cadre de relations de trop grande dépendance à l’adulte, alimentant des an- goisses de type abandon ou séparation. Ou bien, révéler des carences affectives chez des enfants n’ayant pas pu intérioriser suffisamment la confiance en eux. Ils vont être en quête permanente de réassurance, d’attention d’autrui, de stimulus pour se sentir exister” , alerte Cathe- rine Rascle, pédopsychiatre. Si l’ennui s’installe de manière permanente, il peut être salutaire de consulter un professionnel. Avec des limites !

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