ANFORM MARTINIQUE N97

juillet - août 2021 • anform ! 65 © SHUTTERSTOCK dominée par les gestes barrières, Natacha a su abaisser les siennes pour s’explorer pleinement. Jessy, gérante d’un love shop à Basse-Terre (Guadeloupe), confirme cet engoue- ment : “J’ai été surprise des fortes sollicitations de mes clientes !” Elle a dû mettre en place le click and collect ou livrer dans l’urgence. Les vibromas- seurs notamment ont fait fureur chez ses clientes célibataires ou en couples confinés séparés. Selon la profession- nelle, “c’était pour stimuler monsieur à travers des vidéos ou s’occuper en attendant le déconfinement.” Les couples sous le même toit ont préféré les kits BDSM (2) (sangles, attaches, menottes), lingeries et jeux de dés éro- tiques. VIBROMASSEURS ET LINGERIE Loïc, gérant d’un love shop à Jarry (Guadeloupe), a noté une croissance des ventes post- confinement sur les tenues (bodys) et huiles de massage. “Les couples cherchent la variété et chacun veut surprendre l’autre pour se redécouvrir, approfondir la relation.” Expérience vécue par Christophe, en couple depuis 9 ans. “Éloigné de ma com- pagne depuis 4 mois, je suis revenu en Guadeloupe pour être confiné avec elle.” Au début, c’est le feu d’arti- fice : deux, trois rapports par jour, dû au manque affectif et sexuel. Après 1 mois, le rythme chute. “Je ne suis pas une machine”, déclare Christophe, avec sourire mais fermeté. “La routine commençait à s’installer.” Sous les observations de sa compagne, il décide d’innover. Pour chasser l’ennui, les ébats migrent de la chambre vers le reste de la maison et (chut !) en pleine nature. “J’avais besoin de changer de contexte pour me remotiver. On a appris à se poser, s’écouter, parler de nos fantasmes. On ne baisait plus. On faisait l’amour.” De nouveau séparés géographi- quement, “on reste proches psycholo- giquement”. Le couple se retrouve régulièrement pour des jeux coquins à travers l’écran, avec une seule hâte, celle d’être de nouveau réuni. TUE-L’AMOUR Pour Lina et Sylvain, 29 et 33 ans, se voir toute la journée ne devait pas rimer avec se laisser aller. “L’institut de mon esthéticienne fermé, j’ai vite acheté une crème dépilatoire !” , com- mence Lina. “Pour moi, c’est pareil”, ajoute Sylvain. “Je sais qu’elle aime que je prenne soin de moi. Donc, même confiné, je faisais attention.” Idem pour les tee-shirts publicitaires. “Ce sont des tue-l’amour !”, insiste Lina. “Il préfère aussi que je m’habille moulant…” , dit-elle, partageant un regard complice avec son homme. Si le confinement a eu un impact, ce n’est pas sur leur libido, mais plutôt sur le timing. “Avant, on faisait l’amour plutôt le matin ou le soir”, indique l’infirmière. “Pendant le confinement, complète Sylvain, commercial, c’était plus au moment de la sieste ou en fin de journée.” Pas anxieux de nature, faire l’amour n’était pas un moyen pour eux de se détresser ou de tuer l’ennui mais de vivre leur désir et ren- forcer leur lien amoureux. Au point de faire naître un projet de maternité… (1) Les noms ont été changés par la rédaction. (2) Bondage, discipline, domination, soumis- sion, sado-masochisme. La sexualité virtuelle (photos/vidéos) a joué un rôle important pour garder le contact et capter l’attention de l’autre. Dans les relations établies, cela apporte une complicité. Le confinement a aussi été un temps pour apprendre à mieux vivre seul. Cette autosuffisance a permis de voir que partager avec l’autre devait être un bonus et non plus un besoin. Globalement, on a l’impression d’avoir survécu à une guerre et pris conscience de la précarité de la vie. C’est pourquoi le confinement a été un élément déclencheur chez beaucoup pour réévaluer leur fonctionnement, changer leurs habitudes. On a vu des couples classiques décider de donner vie à leurs fantasmes autrefois tabous et refoulés. Ils ont décidé d’aborder la vie avec plus d’ouverture et d’accompagner le parte- naire dans ses fantasmes. Pour maintenir le désir dans une relation saine, il faut savoir s’observer, se ressentir et avoir comme maîtres- mots la communication, la sincérité, la loyauté et le respect. Les mots de la psy Maria-Isabelle Delacruz, psychologue-sexologue

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