ANFORM MARTINIQUE N82
108 anform ! • janvier - février 2019 Harpagon Au secours, mon homme est radin ! Autant le dire tout de suite, le sujet est tabou. Dire à quelqu'un qu'il est radin, surtout si c'est un proche, relève de la mission impossible. D'autant que l’avare n'a, en général, pas conscience de son rapport problématique à l'argent… PAR EUGÉNIE GRANDET “Au moment de Noël, c'est toujours moi qui fait les cadeaux pour toute la famille. Mon conjoint gagne bien sa vie, mais ne dépense rien. C'est un peu comme si ça ne le concernait pas. À ses yeux, c'est inutile, futile, c'est du gaspillage. Quand mes enfants étaient petits et qu'ils croyaient encore au père Noël, il m'est arrivé de me faire mes propres cadeaux et de les déposer sous le sapin de peur de me retrouver sans rien. Je me voyais mal leur dire : “Le père Noël n'a rien apporté à maman car elle n'a pas été sage !” Il y a aussi les cadeaux invrai- semblables. Comme cette robe de marque offerte à mon anniversaire, absolument immettable, pas du tout à ma taille, achetée autour de 5 euros sur un site de ventes promotionnelles en ligne.” Et quand on n'aime pas dépenser son argent, quand bien même on en a, on ne le fait pas pour soi non plus, même pour des choses nécessaires au quotidien. “Mon mari porte les mêmes vêtements depuis © ISTOCKPHOTO I l y a des signes qui ne trompent pas. Vous faites les courses. Au moment de passer à la caisse, le radin trouvera toujours un moyen de se défiler. Une boisson à aller chercher à l'autre bout de l'hy- permarché, un livre (jamais trouvé) au rayon librairie… Au restaurant, c'est encore la même histoire, tou- jours aux toilettes ou au téléphone (un truc urgent pour le boulot !) quand la serveuse se pointe avec l'addition. Mieux encore, au départ de la maison, au bout de 10 min de voiture, il vous demande l'air de rien : “Au fait, tu as bien ton portefeuille ?” VIEUX VÊTEMENTS D'ailleurs, si votre conjoint n'aime pas sortir son chéquier, c'est presque toujours votre voiture qui est réquisi- tionnée pour les sorties familiales, surtout si c'est un peu loin. Et pour ce qui est des cadeaux, il ne manque pas d’inventivité. Solène, mariée à une personne très “économe” raconte : que je le connais ! ironise Solène. Son jean 501 des années 1990 archi délavé, usé, râpé en bas et surtout tel- lement démodé, il le porterait toujours si je ne l'avais pas jeté sans lui dire. Je crois qu'il le cherche encore.” RADIN.COM Encore très mal vus il y a quelques décennies, les radins sont de plus en plus nombreux à s'afficher au grand jour. Le contexte de crise financière, de prise de conscience écologique, le refus du gaspillage et du consumérisme donnent de nou- veaux arguments aux personnes qui auraient une tendance à la pingre- rie. Preuve en est, les sites tels radin. com, où l'on propose des réductions et autres bons d'achat ou bons plans fleurissent sur la toile. En réalité, les sociologues et les psychologues dis- tinguent deux catégories de radins : les avares et les économes. L'éco- nome épargne dans le but de réaliser un projet futur, comme acheter un
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