ANFORM MARTINIQUE N75

36 anform ! • novembre - décembre 2017 Dossier Émotions fortes La gourmandise serait même une question de survie ! “À chaque instant de la vie, le cerveau et les autres cellules de l’organisme vivant doivent disposer de sources d’énergie […]. Le fait de ressentir du plaisir, au moment ou après la consommation d’aliments adaptés aux besoins, procure un avantage dans la sélection naturelle. L’homme a pu survivre, comme tant d’autres espèces, parce qu’il aime manger, parce que manger assure, non seu- lement la plénitude de ses réserves nutritionnelles, mais encore un plaisir qui le guide et le récompense” , note France Bellisle, chargée de recherche au Centre national de la recherche scientifique (1) . Viennent aussi s’ajou- ter un cocktail d’hormones agréables, délivrées par le cerveau lorsque nous dégustons un aliment (dopamine, sérotonine, endorphine, etc.). Leurs effets positifs sur le stress sont simi- laires à celui d’opiacée comme la morphine ! Serions-nous donc de simples “victimes” de la chimie de notre cerveau ? Pas si simple. Le chemin des sensations gustatives est bien plus sinueux. Notre corps sélectionne les ali- ments qui nous procurent des réactions émotion- nelles positives. Une pizza quatre fromages pour Nayali, 12ans, un plat de lambi pour Rudy, 40 ans, un colombo de poulet pour Patri- cia, 36 ans. Mais s’il n’était question que d’hormones, la logique voudrait que l’effet escompté soit bien plus long à atteindre, le temps que l’organisme assimile ces aliments. Le plaisir du gour- mand s’obtient donc par des moyens plus imméd i a t s . “Notre alimentation est indénia- blement liée à l’affectif. Ce rapport commence quand le bébé se nourrit sous le regard affectueux de sa mère”, rappelle Barbara Logis, psy- chologue. Le corps associe une expérience gustative àdes émotions positives provoquées dans le passé. Souvenez-vous de la madeleine de Proust. Chaque bouchée réveille en lui le souvenir ancien des petites madeleines que sa tante lui offrait le dimanche matin après les avoir trempées dans une infusion de thé. Les odeurs, les sensations, les sons et les images sont comme sauvegardés dans un “disque dur”gustatif. “Cela marche aussi dans le sens contraire. Votre cerveau cataloguera un aliment comme moins bon ou mauvais, si vous en avez eu une expérience mal- heureuse”, explique Karelle Fernet, diététicienne nutritionniste. Culture et hérédité Nos préférences alimentaires sont aussi le résultat d’une histoire génétique, familiale et culturelle. Le caractère inné de la préférence du nouveau-né pour le sucré est désormais un fait acquis par la communauté scientifique. Quant aux autres saveurs, elles sont influencées par notre environne- ment. Les parents jouent donc un rôle essentiel dans la détermination des habitudes alimentaires de leurs enfants. “L’éducation nutritionnelle vient des parents. La perception gustative d’un aliment se conso- lide dès le plus jeune âge lorsque le parent fait goûter de tout à son © ISTOCKPHOTO ••• •••

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