ANFORM MARTINIQUE N75

novembre - décembre 2017 • anform ! 161 violence, dépression) au sein d’une même famille que l’on identifie parfois l’existence d’un secret fami- lial. Il entraîne des psychopathologies transgénérationnelles. Ainsi, on peut ne pas avoir consciemment connais- sance d’un secret et en porter tout de même les conséquences. On peut ressentir une zone de silence, de flou ou de malaise, se mettre àrechercher des indices, écouter aux portes… “J’ai découvert tardivement qui était mon père biologique en fouillant dans les vieilles lettres de ma mère. Elle n’a jamais voulu me le dire. J’ai appris que mon père était en fait mon oncle, le frère de mon père. Je com- prends à présent les disputes lors des repas de famille, la colère de mon père dès qu’on évoquait le prénom de son frère. J’aurais préféré le savoir avant. Cela m’a torturée pendant plus de 30 ans. J’aurais aimé avoir une chance de le connaître. Il est aujourd’hui décédé et je me sens trahie” , déplore Mathilde, 32ans. Les enfants sont d’ailleurs assez doués car très intuitifs pour entrevoir les secrets. Mais ils peuvent mal les inter- préter et surtout se sentir coupables, fantasmer la réalité et déformer les événements. “Enfant, j’ai toujours cru que si ma mère était dépressive c’était parce que je n’étais pas assez gentil avec elle. Je me sentais respon- sable de son humeur. J’ai compris en grandissant que c’était en fait à cause de la double vie de mon père” , regrette Mathéo, 17 ans. L’enfant peut tout imaginer, parfois même pire que le véritable secret ! BRISER LES CHAÎNES La révélation d’un secret de famille peut être vécue comme un choc. La charge émotionnelle peut être impor- tante et engendrer stress, anxiété, processus de deuil… Il est donc nécessaire de préparer le terrain : attendre le bon moment, organiser une rencontre, privilégier un rendez- vous dans un endroit calme, privé. Pour d’autres, la révélation peut être vécue comme un véritable soula- gement, confirmant des années de doutes, d’inquiétudes et apportant enfin des réponses. La révélation permet une nouvelle lecture des faits, une nouvelle compréhension de son histoire, de ses origines. Révéler un secret de famille permet d’offrir aux autres générations une chance de briser les chaînes. Mais il faut souvent du temps pour s’imprégner de cette nouvelle réalité. La notion “d’après- coup” ou “post-révélation” est donc inévitable. Celui qui souhaite être acteur de la révélation doit trouver une personne ressource, extérieure à la famille (le conjoint, par exemple), un soutien. Il peut aussi avoir besoin d’un accompagnement psychologique soit pour se préparer à la révélation d’un secret, mieux appréhender les choses, soit pour mieux vivre l’après révélation, digérer et accepter. En ce qui concerne les enfants, il faut savoir les protéger d’une vérité trop violente. Parler, par exemple, de l’existence d’un secret sans forcément aborder le contenu. Trouver un juste milieu entre le silence et une révélation qui serait trop chargée émotionnelle- ment. Pour une entente harmonieuse au sein d’une famille, il est néces- saire de savoir bien communiquer. Il faut apprendre àse dire les choses, à s’écouter les uns les autres. Les thérapies familiales ou systémiques peuvent favoriser les échanges intra- familiaux, optimiser la verbalisation lors de discussions et parfois aider dans la résolution des conflits. © ISTOCKPHOTO

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