|anform ! ◆ mai - juin 2024| 31 clinique de phase 3*. Mais les scientifiques demeurent prudents. Notamment, parce que l’essai n’a pas étudié l’effet contre les sérotypes 3 et 4 « qui n’étaient pas en circulation lors de l’étude », précise l’experte de Pasteur. De plus, l’efficacité contre les sérotypes 1 et 2 n’a été évaluée que jusqu’à 2 ans après l’injection. Mais cela n’ébranle pas l’optimisme d’Anna-Bella Failloux : « Il faut suivre le schéma expérimental. On a peu de recul. Donc la prudence est de mise. Cependant, j’ai lu la littérature scientifique et l’évaluation du vaccin a été bien réalisée. » ◆ Vaccin japonais L’autre piste à suivre est du côté de la France où la Haute autorité de santé devrait se prononcer sur le vaccin japonais Qdenga en juin prochain. En attendant la recommandation de l’organisme français, le vaccin administré en deux doses est autorisé en Europe depuis décembre 2022. Selon le Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars), Qdenga présente une efficacité de 49 % à 95 % en fonction des sérotypes. Cette organisation consultative française mise en place auprès des ministres chargés de la santé et de la recherche souligne, par ailleurs, qu’ « il n’a pas été noté de surrisque significatif chez les séronégatifs vaccinés par rapport aux non-vaccinés, mais ce point doit être confirmé sur des études plus larges ». ◆ Désillusions Avec deux vaccins sur le marché et un troisième en bonne voie, l’horizon de la lutte contre la dengue semble s’éclaircir. Des vaccins qui suscitent d’autant plus d’espoir lorsqu’on repense aux désillusions générées par Dengvaxia, le vaccin injectable en trois doses de Sanofi en 2015. 2 ans plus tard, le laboratoire français avait reconnu que des formes sévères de la dengue étaient susceptibles de se produire en effets secondaires. Anna-Bella Failloux, chercheuse à l’Institut Pasteur, se souvient de cas de fièvres hémorragiques chez des enfants aux Philippines après l’administration du vaccin. Cela explique pourquoi, d’après un avis du Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars) en avril 2023, « le vaccin est en pratique très peu utilisé en France ». En attendant, à court terme, la prévention devra continuer de reposer sur la lutte antivectorielle en diminuant les populations de moustiques. « Si un vaccin est important, la participation de la population l’est tout autant. L’urbanisation et les difficultés d’assainissement des eaux poussent à faire des réserves propices à l’installation de gîtes larvaires », alerte Anna-Bella Failloux. Selon l’experte, l’éducation sanitaire (pour convaincre les citoyens d’éliminer toutes les rétentions d’eau où les moustiques pondent leurs larves) est très avancée aux Antilles et en Guyane. Il s’agit de la maintenir. *Étude sur 16 000 participants publiée dans le New England Journal of Medicine, 1er février 2024. Plus de zones concernées Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le virus de la dengue se propage dans des régions auparavant épargnées par la maladie. 50 % de la population mondiale vit désormais dans des zones à risque. La transmission de la dengue est cyclique et on peut s’attendre à de grandes épidémies tous les 3 à 4 ans.
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