ANFORM MARTINIQUE N109

| anform ! ◆ juillet - août 2023| 37 Dans un cadre verdoyant, à quelques mètres de la magni- fique plage des Hattes (répu- tée pour la ponte des tortues luth), se dresse un lieu de soin résidentiel à ossature bois décoré de grandes fresques murales. C’est là que vivent en toute sécurité les femmes de la communauté Yépi Makandra. Avec ou sans enfants, elles sont accompagnées au quotidien par une équipe pluridisciplinaire (médecin, psychologue, infir- mière, médiateur interculturel, travailleur social, éducateur, animateur). Leur objectif com- mun ? Se reconstruire. « Le centre de soins a une capacité d’accueil de 20 places pour les femmes et 15 pour les enfants. Il s’agit de femmes en situation d’addiction aux produits psy- choactifs (crack, cocaïne, alcool, cannabis) qui arrivent en fin de sevrage et sont prêtes à réaliser une expérience d’abstinence ou qui souhaitent, sous certaines conditions, commencer leur sevrage au sein de la communau- té. C’est avant tout une démarche volontaire » , note en préam- bule, Laurène Paris, cheffe de service. Selon l’âge, les enfants sont scolarisés à l’école d’Awala ou à Mana. Une intervenante petite enfance est également sur place. « Nous avons le projet d’ouvrir une crèche au sein de la communauté » , poursuit Lau- rène Paris. ◆ Planning chargé « L’oisiveté est la mère de tous les vices. » Ce proverbe s’applique au sein de la communauté théra- peutique. 6 h du matin, au chant du coq, la journée commence. Les femmes se retrouvent autour d’un petit-déjeuner. Chacune prend le temps d’exprimer sa « météo » du jour, sa nuit passée. 8 h, le planning de la journée est annoncé. À tour de rôle, durant 2 h, elles s’affairent à différentes tâches ménagères : entretien du linge, du jardin, préparation des repas. S’ensuit un déjeuner communautaire, puis un temps de repos jusqu’à 15 h. De 15 h 30 à 18 h, des ateliers thérapeu- tiques (moments d’échanges, groupes de paroles, atelier photo-langage), créatifs (sculp- ture sur calebasse, confection de bijoux, peinture), des activités sportives sont mises en place. « Les femmes de la commu- nauté arrivent avec une mine grave. Puis petit à petit, elles retrouvent le sourire, la santé. C’est très gratifiant pour nous » , souligne Alain Gipe, éducateur technique. La journée se termine par une réunion de bilan où chacune exprime son ressenti. À 21 h 30, extinction des feux, elles regagnent leur chambre. Les week-ends sont consacrés aux visites de la famille, au sport, aux jeux de société, à des ateliers bien-être. Témoignages « Cela me faisait du mal » J’ai pris la décision de venir à la com- munauté thérapeutique, car j’ai traversé un moment très difficile dans ma vie. Je suis tombée dans l’addiction, l’alcool, la cocaïne. Cela me faisait du mal. Je ne me sentais pas bien. J’avais l’impres- sion que la vie ne valait plus le coup. Josiane Da Silva Nascimiento, jeune résidente « Les encourager » Dans la gravure de calebasse, il faut faire preuve d’imagination, de tranquillité, il faut avoir une vision de ce que l’on va réaliser, être à l’écoute, se comprendre et comprendre l’autre. Notre rôle est aussi de les encourager. C’est fondamental. Alain Gipet, éducateur « J’élève seule mon enfant » J’ai beaucoup souffert. J’ai des pro- blèmes que je n’arrive pas à expliquer, car je n’arrive pas à parler avec les gens. Je dois élever seule mon enfant. Je me dis que peut-être, un jour, je serai heureuse. Une résidente « Être ensemble » Nous avons créé un atelier de photo- langage. C’est un atelier collectif afin que les femmes se réconfortent mutuel- lement. C’est cet esprit de « l’être ensemble » qui transperce. Chacune se livre en ayant conscience qu’elle est entendue par un groupe de femmes dans une ambiance de bienveillance et d’écoute, d’accueil des émotions et des histoires de chacune. Léa Pinheiro, psychologue

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