ANFORM MARTINIQUE N103
6 anform ! • juillet - août 2022 rencontre ••• Gérard Sainte-Rose est un amoureux de la nature. C’est aussi un homme engagé pour la production locale et la valorisation des richesses naturelles de la Martinique. PAR ÉLODIE DRANÉ L a petite maison de Gérard Sainte-Rose est une oasis de quiétude à l’écart de la zone industrielle de Bois Rouge à Ducos. Sur la terrasse, de jolies fleurs bleues grimpent le long de la balustrade, tandis que des chats se prélassent au soleil. D’ici, on aper- çoit des champs et, en contrebas, une grande serre. C’est là qu’il cultive ses différentes variétés de riz. C’est aussi là que se trouve sa pépinière d’arbres fruitiers, goyaviers, jacquiers, mandariniers, orangers, “toutes les espèces qui peuvent avoir un intérêt patrimonial ou pour la santé et l’envi- ronnement”, précise-t-il. Souvent, des gens lui apportent des graines ou des plants. C’est comme ça qu’il déniche des variétés ou des espèces en voie de disparition. Patiemment, il fait germer chaque graine, les arrose, les sélec- tionne, puis effectue des recherches, et met en lumière leurs propriétés et vertus. Dans son jardin, qu’elles soient nourricières ou médicinales, les plantes ont toutes une utilité. Agriculture organique Entre une récolte de pois d’Angole et des conserves de fruits, nous nous installons pour discuter, un verre de son kombucha à la grosey à la main. Cheveux blancs, allure jeune et spor- tive, l’homme se présente comme un agrobiologiste. En effet, dès 1979, après une formation en agriculture au CFFPA de Rivière-Pilote, il lance sa première exploitation agricole et obtient ses premières récoltes grâce à la pratique d’une agriculture bio- logique. À cette époque, les produits phytosanitaires issus de l’industrie pétrochimique ont le vent en poupe en Martinique. Mais lui s’en méfie : “C’était une aubaine pour l’industrie chimique d’après-guerre de recycler ses produits. Mais comment une industrie destinée initialement à semer la mort peut-elle concevoir des pro- duits pour encourager la vie dans les champs ?” , interroge-t-il. Il prône le respect des cycles naturels et préfère faire confiance aux méthodes des anciens, en utilisant les associations de plantes plutôt que des intrants chimiques. Ses connaissances en agriculture biologique, il les tire essen- tiellement du terrain. Et préfère parler d’agriculture “organique”, car ses pratiques sont encore plus exigeantes que celles du cahier des charges du label AB : “Que de la paille, de la fibre de coco et la sueur de mon front !” , dit-il. À ses débuts, il produit plusieurs types de chicorée, de chou chinois et de radis, et livre jusqu’à 1 000 bottes de radis rouges aux grandes surfaces de l’île. Parallèlement, il ne cesse de promouvoir le manger sain et local. Il a ouvert le premier restaurant végéta- rien de la Martinique, la Papaye verte, en 1984, dans lequel “seuls l’huile, la farine et les oignons étaient des pro- duits importés. Tout le reste, c’était des produits du péyi.” Il a dirigé d’autres restaurants en Martinique, et même à Paris. “Nous avons accueilli des clients du monde entier et fait connaître les saveurs martiniquaises” , explique- t-il fièrement. Culture du riz Par la suite, il a publié plusieurs livrets sur l’écologie, la culture et les proprié- tés des fruits et légumes tropicaux. Celles de la banane ou de la goyave, par exemple. Le dernier en date parle du riz, cette céréale que nous consom- mons en grande quantité, mais pour laquelle nous sommes totalement dépendants de l’extérieur, par mécon- naissance de sa culture selon lui ! Gérard Sainte-Rose est autosuffisant en riz et distribue des plants à qui le veut. Il est fondateur de l’association Orgapéyi dont il a aujourd’hui passé le flambeau. Et, il a créé, il y a 2 ans, l’ANFAM qui compte une soixantaine Gérard Sainte-Rose, agrobiologiste passionné
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