ANFORM MARTINIQUE N103

44 anform ! • juillet - août 2022 une zone pathogène plutôt qu’éro- gène” , analyse la quinquagénaire. Les conséquences psychologiques touchent sa vie intime des années plus tard. Son mari n’a pas le droit de toucher sa poitrine. Alors, quand la perte de kilos et l’allaitement défor- ment son 110 C, c’en est trop : “J’ai passé commande pour un 90 B”, déclare-t-elle, fière. Elle revit. Elle ne croise plus les bras pour cacher sa poitrine. Elle ne marche plus courbée et ne souffre plus du dos. “Ma vie n’est plus entre parenthèses. C’est comme une reconquête” , confie Fabienne. Une nouvelle vie plus radieuse même si “quand tu as longtemps considéré une partie de ton corps comme ennemie, ça ne part pas comme ça”. “ME FAIRE OPÉRER ÉTAIT OBSESSIONNEL” La “partie ennemie” de Chrystèle était un 70 A jusqu’à 31 ans. “Me faire opérer était obsessionnel depuis l’adolescence. Aucun garçon ne m’a jamais blessée par ses remarques. Mais j’étais entourée de filles jolies et en forme. Je voulais m’affirmer.” Elle se revoit dans le cabinet du chirurgien à Fort-de-France. “Je me suis mise debout face à lui, les poings sur les hanches à la Wonder Woman et lui ai dit : “Je veux un 90 D !” Je rêvais de ce moment” , lâche-t-elle dans un grand éclat de rire. Aujourd’hui, Chrystèle se trouve plus sensuelle et fait de ses seins un atout. Selon Sarah Zerbib, plaisiro- logue et psychologue clinicienne, “les seins renvoient à une forme de narcissisme. Quelle image j’ai de moi-même, de mon corps ? La société est exigeante et certaines femmes tentent de compenser un manque avec la chirurgie. Cela peut être libérateur mais pas forcément suffisant si le mal-être est ailleurs”. Chez Lina, aucun mal-être avec son 90 E. Ses seins, “c’est comme quelqu’un. Je leur parle. Je les ai baptisés “les jumelles””, s’enorgueil- lit la conseillère en vente de 28 ans. Elle admet sans rire qu’elle “expose [ses] seins” car “ils sont claustro- phobes”. “Je suis fière de voir le désir dans le regard de l’autre. Mes seins ne créent pas ma beauté, mais je sais que je ne passe pas inaper- çue.” Si les seins attirent tant, Sarah Zerbib rappelle que “les femmes ne sont pas des meubles en kit. Le corps doit être célébré dans son har- monie générale. Les seins font partie des femmes mais leur identité ne se réduit pas à leurs seins”. ••• © SHUTTERSTOCK,

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