ANFORM MARTINIQUE N101

mars - avril 2022 • anform ! 41 ••• À partir de 12 h d'éveil On ressent une grosse envie de dormir. Et ça ne va pas s'arranger... À partir de 24 h La température corporelle s'élève, les batte- ments du cœur s'accélèrent. La concentration commence à baisser. On met 10 % de temps en plus pour effectuer des calculs simples. La force musculaire faiblit. Et on commence à se sentir de mauvais poil. À partir de 48 h sans sommeil L'agressivité augmente, tout comme l'agita- tion. Les yeux sont rouges et irrités, la vision se trouble et la lumière devient insupportable. Les réflexes s'érodent, on met 50 % de temps en plus pour effectuer des calculs mentaux. La mémoire à court terme et la capacité à raison- ner se dégradent. Au-delà de 72 h Seule l'expérience de Randy Gardner témoigne des effets de la privation de sommeil au-delà de 72 h. Il commence à souffrir d'hallucina- tions. Pesant à peine 60 kg, il se prend pour Paul Lowe, un footballeur américain à la carrure impressionnante ! Sa mémoire défaille. Au-delà de 96 h Le délire le guette. Sa pensée est désorganisée, ses propos décousus. Il ressent des fourmille- ments dans les pieds et les mains, se montre hypersensible à la douleur, ses muscles se contractent de manière involontaire. Au-delà de 110 h Les hallucinations auditives s'ajoutent aux visuelles. La parole est plus grave, ralentie, il éprouve des difficultés à terminer ses phrases et à articuler Au-delà de 164 h Randy commence à souffrir sporadiquement de paranoïa, imaginant que les médecins qui le suivaient se moquaient de lui. Il n'était plus capable d'aligner un simple calcul mental. Au bout de 264 h Une fois son pari gagné, Randy a dormi 14 h. Au bout de quelques jours, il semblait avoir parfaitement récupéré. Mais s'il avait continué, il risquait gros. S oyons clairs, les expé- riences de privation longue de sommeil sont interdites. Voilà des décennies qu'au- cun laboratoire n'étudie plus ses effets. Heureusement, car l'expérience est notoirement désagréable. Empêcher un prisonnier de dormir au cours de longs interrogatoires est une technique classique utilisée, même en garde à vue, pour arracher des aveux. Et ça marche ! Une expérience, menée sur des étudiants de l'université de l'État du Michigan en 2016, montre qu'on avoue plus facilement une erreur qu'on n'a pas commise après une nuit blanche... Au-delà de 24 à 48 h sans sommeil, l'expérience confine à la torture. Une pratique en théorie prohibée par le droit international, même si certaines organisations et états continuent de la pratiquer en sous-main. À l'occasion d'expériences anciennes, ou de cas pathologiques exception- nels, on a pu cependant se faire une idée de ce qui se passe quand on est privé de sommeil. Le détenteur officiel de la plus longue période d'éveil est Randy Gardner, un jeune Américain qui, en 1965, à 17 ans, avait fait le pari de rester 264 h sans dormir. Soit 11 jours et surtout 11 nuits, surveillé en continu (y compris aux toilettes) par deux amis chargés de l'empêcher de piquer du nez. Grâce à lui, on sait ce qu'on risque à tenter l'expérience. Même s'il est probable que la sévérité, la durée, et même la succession des symptômes peuvent varier d'un indi- vidu à l'autre. 264 h sans dormir La dégradation d’heure en heure

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