ANFORM GUYANE N88

janvier - février 2020 • anform ! 81 ••• philosophiques sont aucœur des préoc- cupations de l’hypersensible. Le stress et les stimulations extérieures (bruits, odeurs, foule, température) et inté- rieures (faim, soif, fatigue) deviennent de l’hyperstimulation engendrant des réactions excessives (grosse fatigue, palpitations, pleurs, trous de mémoire, réactions fortes mais pourtant en accord avec les ressentis hypersen- sibles). Malheureusement, cette incompréhension pousse l’individu àse considérer comme anormal, àse sentir pathologiquement instable (hystérie, borderline, Asperger…). “Dès l’en- fance, j’ai plus ou moins compris que j’étais différent. Je réagissais toujours mal quand les instituteurs parlaient fort. Le bruit de mes camarades me déran- geait pendant les évaluations. J’avais du mal à me concentrer et j’étais tou- jours dans la lune. Plus tard, dans ma vie d’adulte, j’ai eu tendance à m’iso- ler des autres, à rester seul, au calme, chez moi. Pour m’évader, je faisais des activités artistiques comme du dessin et du piano, domaines dans lesquels j’excellais. J’ai réussi de hautes études littéraires dans des classes à effectifs réduits. J’ai commencé une thérapie à l’âge de 23 ans, après le décès de mon frère, et j’ai enfin compris qui j’étais. Je suis hypersensible !”, raconte Pierre, 28 ans. De nombreux patients hyper- sensibles arrivent au cabinet avec cette question : “Suis-je fou, docteur ?”“Non, vous êtes différent, et c’est tant mieux !” Ilest important d’avoir conscience de sa différence et de l’accepter. Est-ce une maladie mentale ? Non, l’hypersensibi- lité ne fait pas partie du tableau clinique des psychopathologies (troubles de la personnalité, troubles de l’humeur…). Il faut éloigner les hypothèses d’hysté- rie et de cyclothymie avec un diagnostic différentiel. Être hypersensible, c’est donc se sentir en décalage avec les autres et avoir peur de basculer dans la folie. FORME D’INTELLIGENCE Comment vivre avec ? Il faut parler de ses difficultés et parvenir à la gestion émotionnelle. Les techniques et théra- pies existantes sont jugées adéquates si elles ne tentent pas de réprimer l’hypersensibilité mais, au contraire, permettent à l’hypersensible de vivre avec son excès de sensibilité, de l’as- sumer et de trouver des occupations mettant en valeur cette énergie. Il faut savoir faire de son hypersensibilité un atout ! Tout hypersensible peut réussir à bien vivre avec sa sensibilité. Et surtout, prendre le droit de l’être. C’est une différence à cultiver comme une forme d’intelligence et de sixième sens. L’hypersensible ressent les choses par instinct, développe un sens intuitif très fort. L’attirance pour l’art est un trait commun des hypersensibles. Ils savent le comprendre et l’apprécier. De nom- breux artistes sont reconnus comme doués de talents mais aussi d’hyper- sensibilité (Dali, Picasso, Baudelaire, Marion Cotillard…). Ils ont un besoin d’expression développé, une créativité et une imagination assez aiguisées. Les métiers des relations humaines et d’aides sont aussi au cœur des qualités communes. L’empathie est un de leur point fort, cette capacité de se mettre àla place d’autrui. Les hypersensibles sont généralement des soutiens pré- cieuxpour leurs proches. Ils partagent de façon authentique les joies comme les souffrances. Mais àvouloir toujours faire plaisir auxautres, ils ont tendance às’oublier. Il faut donc savoir prendre du recul et se retrouver face à soi- même. Àl’inverse, la personnalité peut aussi s’exprimer sur un trait d’hypo- sensibilité. Il existe donc des personnes hypo-sensibles ou alexithymiques (incapacité àexprimer ses émotions). C’est une autre façon d’être, de penser et de voir le monde. En sciences humaines, on peut profiler ces per- sonnes dans certains métiers comme soldat, chirurgien, politicien. L’absence de sensibilité peut également amener de la souffrance psychologique : inca- pacité à verbaliser ses émotions et ressentis, passages à l’acte auto et hétéro-agressifs. “Tout hypersensible peut réussir à bien vivre avec sa sensibilité. Et surtout, prendre le droit de l’être. C’est une différence à cultiver comme une forme d’intelligence et de sixième sens.”

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