ANFORM GUYANE N86

septembre - octobre 2019 • anform ! 81 réalité est pourtant tout autre. On ne naît pas mère, on le devient. Quant à être une mère parfaite, c’est une autre histoire ! Est-on unemère parfaite parce qu’on garde son calme en toutes cir- constances, qu’on n’est qu’amour et apaisement, qu’on est à l’heure chaque jour, qu’on cumule, combine et sur- monte deux métiers, qu’on applique les meilleurs principes éducatifs, stimule la créativité de ses enfants, qu’on les nourrit de tendresse autant que de bons petits plats ? Mission impossible ! Dans la réalité, unemaman parfaite est avant tout une femme “au bord de la crise de nerfs” qui s’évertue à réaliser au mieux toutes les tâches qui lui incombent. Oui, il peut arriver à une mère digne de ce nom d’oublier son enfant à l’école, d’être en retard, d’avoir une maison qui ressemble à un champ de bataille, de ne pas repasser le linge de ses enfants, de les nourrir de cochonneries, de hurler là oùparler calmement aurait été plus “socialement” correct et du coup de se sentir coupable, de s’en vouloir… SE LIBÉRER De plus en plus de femmes assument de ne pas parvenir à répondre (ou de ne pas vouloir répondre) à ces idéaux de perfection. Certaines revendiquent même de ne pas sacrifier toute leur vie à leurs enfants. Elles avouent leur plaisir à reprendre le boulot à la fin du congé maternité, reconnaissent mettre un casque sur les oreilles pour ne plus entendre les cris et les chamailleries, osent prendre un bain et non une douche, même si du coup bébé reste dans son parc… Pour résumer, elles osent se libérer de toute aliénation liée à la maternité. Plus facile à dire qu’à faire ! En effet, nos conditionnements et nos peurs, nos culpabilisations et nos doutes sont profondément intégrés. Pourtant, lâcher la bride et remettre à niveau nos exigences est fabuleuse- ment libérateur. D’ailleurs, une maman sous pression, accablée par ses propres exigences ne va plus avoir d’exis- tence propre. Elle va se couper de ses besoins, de ses émotions, de l’attention qu’elle se doit à elle-même. Elle se niera donc en tant que personne. Et être une mère, c’est aussi offrir à ses enfants des modèles d’éducation et des exemples de vie cohérents. Or, en ne prenant pas soin d’elle, elle n’apprendra pas à ses enfants à prendre soin d’eux, et donc à devenir autonomes. PENSER À SOI À l’inverse, en s’occupant d’elle, en se libérant du temps, en n’étant pas en permanence focalisée sur ses enfants, elle leur enseignera l’autonomie, l’attention à leurs propres besoins et le respect d’eux-mêmes.Une mère a le droit de penser à elle. C’est même un devoir. Elle a le droit d’être fatiguée, imparfaite, occupée. Comment l’en- fant se positionnera-t-il face à cela ? Il sortira du schéma de l’enfant-roi, apprendra à faire lui-même, se rassu- rera sur ses capacités et nourrira sa confiance en lui. Que du positif donc ! Et puis, qui peut prétendre n’avoir jamais rien raté ? Qui peut prétendre n’avoir jamais failli ? Même nos mères les plus “parfaites” ont, elles aussi, eu des oublis, des faiblesses et même des excès. Déculpabilisons et parlons, expli- quons, racontons à nos enfants notre vérité et tout ce que nous leur voulons d’amour et d’attention sans toujours pouvoir le vivre. Les enfants peuvent nous excuser d’être en retard, nous pardonner une colère injuste si nous sommes capables de leur dire la cause et tout simplement de leur demander pardon. “La perfection, pour une mère réside dans la qualité et la constance du lien d’amour et de socialisation qu’elle incarne, conclut Raphaël Spé- ronel. Dans l’attention et l’éducation de ses enfants qu’elle élève au rang de citoyen. Mais c’est aussi se réaliser en tant que femme, épouse, citoyenne. Il faut bien garder à l’esprit qu’un modèle idéalisé est inatteignable par définition. Rester authentique garantit la part humaine d’une relation.” © ISTOCKPHOTO

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