ANFORM GUYANE N105

novembre - décembre 2022 • anform ! 33 ••• C omment les noms de maladies sont-ils donnés ? Par qui ? Avec quels critères ? Quels contrôles ? La question est légitime, tant leur variété est importante. Il arrive d’ailleurs qu’une maladie puisse être bapti- sée plusieurs fois au cours de son existence. Durant l’Antiquité, les maladies étaient surtout classées par symptômes (mal de tête…). Grâce aux progrès scientifiques, les signes anatomiques ou les lésions ont pu être associés à la dénomination d’une pathologie. C’est le cas de la tuberculose qui doit son nom aux tubercules qu’elle génère sur la peau. Les chercheurs dénichaient souvent une étymologie gréco-latine si possible descriptive comme la fièvre typhoïde (du grec, tuphos, torpeur) ou la diphtérie (du grec diphtéria, membrane). Le suffixe “ite” provenant du grec, puis repris en latin, est utilisé pour former les termes médicaux désignant une inflammation : bronchite, pancréa- tite, cystite... ALOÏS ALZHEIMER Jusqu’au 17 e siècle, le contexte historique pouvait également peser sur l’appellation d’une maladie comme pour l’épilepsie appelée “possession” en raison de l’influence religieuse très forte à l’époque. Au 20 e siècle, le clas- sement des maladies s’est affiné grâce notamment à l’avènement de la biologie moléculaire. À cette époque, plusieurs maladies ont naturellement porté le nom du ou des médecins qui les ont identifiées en premier. La maladie d’Alzhei- mer (1907) doit sa dénomination à Aloïs Alzheimer, psychiatre et neuropathologiste allemand. La maladie de Creutzfeldt-Jacob (1920) à deux neurologues alle- mands eux aussi, Hans Gerhard Creutzfeldt et Alfons Maria Jacob. Les lieux d’apparition géographique sont aussi souvent choisis comme le virus Ébola (du nom d’un cours d’eau du Congo) ou la maladie de Lyme (bourgade du Connecticut). CHOIX HASARDEUX De nos jours, le découvreur choisit le nom de la maladie lorsqu’il publie une étude scientifique sur le sujet. Ce dernier peut être changé ou adopté lors de colloques interna- tionaux où de nombreux chercheurs sont rassemblés. Le nom définitif est attribué par la Classification internationale des maladies (CIM) gérée par l’OMS. Entre temps, les appellations, parfois douteuses, ont pu avoir des conséquences sur le commerce, les voyages, le tou- risme et le bien-être des animaux. Pire, certaines ont pu offenser des “groupes culturels, sociaux, natio- naux, régionaux professionnels et ethniques” . Par exemple, le Sida, à sa découverte, a d’abord été identifié sous le nom de Gay Related Immune Deficiency, soit une immunodéficience liée à l’homosexualité. Pour y remédier, l’OMS a publié, en 2015, un guide pour mieux nommer les nouvelles maladies, adressé aux chercheurs, responsables de santé et journa- Les maladies de “chez nous” • Le zika (transmis par le moustique tigre). Le virus a été découvert en 1947 par des chercheurs qui travaillaient sur la fièvre jaune dans une petite forêt tropicale ougandaise : la forêt de Zika. • La dengue (transmise par le moustique tigre). Deux hypothèses existent concernant l’origine de son nom. Une provenance de l’espagnol “dengoso” qui signifie “guindé, maniéré” , qui ferait référence à la démarche raide qu’ont les malades infectés. Le mot dengue pourrait aussi être originaire d’une expression africaine en langue swahili “ki denga pepo” qui signifie “crampe soudaine causée par un démon”. • Le chikungunya (transmis par le moustique tigre). La première épidémie remonte à 1952-53 en Tanzanie. Le mot chikungunya est utilisé dans la langue de l’ethnie pré- sente Makonde. Il signifie “qui marche courbé en avant” .

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