ANFORM GUYANE N101

30 anform ! • mars - avril 2022 Travailler plus de 24 h : attention aux erreurs Dans certaines professions, on est amené à rester éveillé long- temps. Les sauveteurs chargés de retrouver des survivants (par exemple, après un séisme), les militaires en opération, les espions, les chirurgiens, les aviateurs… alignent parfois plus de 24 h de travail d'affilée. Mais rien ne sert de rester éveillé, si c'est pour accumuler les bourdes. Or, c'est bien ce qui se passe. De nombreuses études attestent qu'une infirmière ou un médecin qui vient travailler avec moins de 4 h de sommeil la nuit précédente commet deux fois plus d'erreurs que celui qui a dormi au moins 7 h. En 1894, le médecin russe Marie de Manaceine a constaté la mort de poussins privés de sommeil pendant 5 jours. L'autopsie a révélé d'importantes lésions au cerveau. Mêmes résultats sur des rats, en 1983. Des chercheurs de l'univer- sité de Chicago les ont forcés à rester éveiller en les déposant sur des petits radeaux flottants sur lesquels ils n'avaient pas la place de s'allon- ger. Ils n'ont pas survécu plus de 3 semaines. Chez l'homme, l'issue semble bien être la même. Dans les années 1970, le spécialiste fran- çais du sommeil, Michel Jouvet, a suivi un malade souffrant d'une forme aiguë et rarissime de chorée fibrillaire de Morvan. Cette maladie provoque d'involontaires secousses musculaires, qui, lorsqu'elles sont généralisées et fréquentes, peuvent interdire tout sommeil. Le jeune homme de 27 ans est resté au moins 4 mois sans fermer l'œil ou presque (26 min de sommeil quotidien en moyenne), malgré un traitement à base de tranquillisants et d'anesthésiants. Curieusement, l'homme ne semblait pas parti- culièrement fatigué, sa mémoire et ses capacités intellectuelles ne semblaient pas altérées. Il souffrait simplement d'hallucinations à la tombée de la nuit. Il déclarait alors qu'il allait chasser le faisan ou faire un tour sur la Lune ! Il finit cepen- dant par mourir à la fin de l'année. Mais en dehors de ces privations aiguës de sommeil, se forcer à dormir moins n'est pas non plus une bonne idée, rappelle Roger Godbout, spécialiste du sommeil à l'université de Montréal : “Dans la vie quotidienne, le manque de sommeil est un problème de santé sociale. Les privations chroniques de sommeil augmentent le diabète, la pression artérielle, accentuent les problèmes de concentration et mettent les gens en danger par manque de vigilance.” Autant de raisons pour aller de ce pas faire la sieste... Lésions au cerveau

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