ANFORM GUYANE N101

mars - avril 2022 • anform ! 19 Covid-19 : comment vont nos ados ? “L'état des lieux aux Antilles- Guyane n'est pas uniforme, car la jeunesse est multiple. Certains adolescents vont très bien ! Mais entre confinements, couvre-feux, fermetures des écoles et un accès beaucoup plus difficile aux loisirs et aux activités, ils bénéficient de moins d'espace de socialisation, alors qu’ils en ont besoin” , souligne Raphaël Essers, cadre socio-éducatif à la Maison des adolescents (MDA) de Guadeloupe et des îles du Nord. L’étude Confeado de Santé publique France, a mis en évidence les conséquences du confinement sur la santé mentale des adolescents (13-18 ans). Entre décrochages scolaires, tentatives de suicide de plus en plus précoces, consommation d’alcool et de stupéfiants, et addictions aux écrans*, la crise sanitaire impacte particulièrement les ados. “Elle a engendré un comportement schizoïde : l'envie de croire aux propos des adultes, mais face aux injonctions contradictoires, il leur est difficile d'y trouver du sens ! Et surtout, il y a une perte de confiance en l'avenir” , repère Frédérique Landro, directrice d’un cabinet d'accompagnement éducatif. * La protection de l’enfance en Outre-mer - État des lieux et phénomènes émergents - Convention nationale des associations de protection de l'enfant (Cnape), nov 2020. “Âge ingrat”, étape de transition et de bouleversements, l’adolescence préoccupe les parents. Particulièrement en cette période de crise sanitaire. Comment y survivre ? Comment accompagner au mieux nos ados ? PAR CÉLINE GUILLAUME © SHUTTERSTOCK “L a puberté marque le début de l’adoles- cence. Elle arrive de plus en plus précocement”, remarque Catherine Rascle, pra- ticien hospitalier, pédopsychiatre, cheffe de service du secteur de la Basse-Terre à l’Établissement public de santé mentale de la Gua- deloupe (EPSM). Elle se traduit par des transformations physiques, afin de permettre la reproduction, et s’accompagne de bouleversements hormonaux et psychologiques. Transformation Des complexes physiques peuvent apparaître, avec la sensation de ne pas être comme les autres. Certains ressentent le plaisir de grandir, de voir leur corps se transformer et d’accéder à plus d’indépendance. D’autres peuvent s’en inquiéter, en particulier s’il existe un décalage entre une puberté précoce et des besoins affectifs et émotionnels encore très infantiles. “Ce type de jeune se présente comme un “grand”, en se positionnant même au-dessus de l'adulte et en se dotant d’un discours très élaboré. Si cela dure, certaines pathologies peuvent émerger” , met en garde la pédopsychiatre.Sans pour autant parler de pathologies, sautes d’humeur, manque de confiance en soi, hypersensibilité, complexes et quête d’identité caractérisent souvent l'adolescence. “Un ado- lescent a la particularité d'aller mal très vite. L’humeur peut s’effon- drer littéralement, à la suite d’une déception, de blessures de l'estime de soi…”, décrit Catherine Rascle. Partagé entre le désir d’une plus grande autonomie et la crainte de ne plus être protégé par ses parents, “ il sait qu’il doit quitter sa peau confortable, “innocente”, et commencer à prendre des res- ponsabilités. Comme un “souda” (bernard-l'ermite, NDLR), sa coquille devient trop étroite pour lui. Il doit en changer”, compare Frédé- rique Landro, directrice d’un cabinet d'accompagnement éducatif. Une recherche identitaire et d’affranchis- sement du modèle parental qui peut pousser à contester l’autorité des adultes et à adopter, parfois, des comportements à risque (ivresse, rapports sexuels non protégés, addictions...). “Un adolescent peut rapidement être piégé dans ses déviances comportementales. Si une situation inquiétante s’installe en quelques semaines, il est vital de réagir !” , conseille Catherine Rascle. Dossier

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