ANFORM GUADELOUPE N96
8 anform ! • mai - juin 2021 rencontre ••• une belle histoire de molécules Le monde entier le découvre, en février dernier, aux côtés du Dr Henry Joseph. Damien Bissessar, un jeune docteur en chimie de 29 ans. Son parcours, de Capesterre à Los Angeles puis son retour au pays natal, résultent de choix réfléchis. Sa passion pour la science fait de lui un “intellectuel”, mais il revendique plus que tout sa spiritualité. PAR ANNE DE TARRAGON L’ histoire de Damien Bis- sessar est celle d’un petit gars de Roseau, qui pêche sur la caye, fabrique des attrape-crabes, vend du poisson, des burgots et des palourdes pour se faire de l’argent de poche. Il chasse avec ses oncles et considère qu’un fruit à pain rôti dans les bois est une belle image du bonheur. Il arrive aussi que sa mère le poursuive, tard le soir, une ceinture à la main, pour le faire rentrer à la maison. “Ma mère nous a offert un cadre, un système d’éducation excellent. Elle nous a toujours donné de bonnes énergies. C’est un modèle pour moi. ” Mère et tantes sont des cuisinières hors pair et le jeune Damien ressent bien tout ce qui se cache derrière le fameux dombré-ouassous, le lambi-riz-pois de bois, la langouste grillée ou les acras. “Cette cuisine contient des molécules d’amour ! Le luxe chez nous, ce n’était pas le poisson, ni même la langouste que nous pêchions. C’était la viande. Elle était chère et donc rare.” Ce gamin libre est aussi un très bon élève. Il commence sa licence à Fouillole, avant de partir pour Strasbourg où il passe brillamment un master en chimie verte, puis son doctorat. “Ma passion, c’était la science. Tous mes oncles sont pêcheurs. Tout petit et déjà très débrouillard, je vendais le poisson, faisant les calculs de tête. Mes mots-clés étaient l’effica- cité et l’argent. J’ai pris conscience très tôt qu’il fallait que je gagne de l’argent pour m’en sortir, évoluer, devenir meilleur et à mon tour aider les miens. J’étais attaché à mon petit monde, mais je rêvais aussi d’en partir.” Recherche spirituelle Damien est un étudiant brillant, encouragé par ses professeurs à Strasbourg, “terreau dont sont issus de nombreux prix Nobel”, quand il a un déclic. “À 23 ans, j’ai trouvé ma voie spirituelle. Un ami m’a conseillé un livre du Dalaï Lama, Compas- sion. J’ai ressenti une ouverture qui a transformé ma compréhension du monde et de moi-même, et m’a permis de mieux me connaître. J’ai commencé à méditer. J’ai mis de l’intention dans ce que je faisais, ça a été un moteur. J’avais beaucoup appris et là, j’avais la sensation d’avoir plus de facilité encore. Pendant ma thèse, j’ai rédigé de nombreuses publications et parti- cipé au dépôt de quatre brevets. Je sentais une forte émulation et je me suis tellement amusé ! En 1 an et demi (au lieu de 3), j’ai relevé le challenge. Ça m’a permis d’avoir du temps pour moi, pour me poser, pour réfléchir, pour savoir ce que je voulais vraiment.” Reçu à sa thèse avec une standing ovation , Damien est courtisé par de nombreuses entreprises, mais il choisit de partir à la Nasa, à Los Angeles, s’ouvrir d’autres horizons. Pour l’agence spatial, il travaille sur l’étude des systèmes de conversion d'énergie applicables sur Mars, autrement dit la conversion du CO 2 (dioxyde de Damien Bissessar,
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy MTE3NjQw