ANFORM GUADELOUPE N96

mai - juin 2021 • anform ! 79 reste un geste intime. L’obliger à faire un bisou, c’est le forcer dans son intimité et cela pourrait avoir des répercussions sur la construc- tion de sa personnalité. S’il n’a pas envie, il faut respecter sa décision, a fortiori sur la bouche. Par ail- leurs, les parents doivent expliquer à l’enfant qu’il est trop grand, que désormais on fera un bisou sur la joue, un sur le front et des gros câlins.” Perpétuer cette habitude dans le temps risque de déve- lopper l’ambiguïté jusqu’à l’idée d’inceste. “JE ME MARIERAI AVEC TOI” D’ailleurs, pour un parent pédo- phile, le baiser sur la bouche est une première étape. Il est ensuite facile d’expliquer à la petite victime qu’elle est son amoureuse et qu’ils vont faire des “trucs” de grands. Françoise Dolto, pédiatre et psy- chanalyste bien connue, disait : “Une maman n'embrasse pas son enfant sur la bouche, un père non plus.” Et pour cause, cela brouille le message entre les différents types d’affections qui existent. On n’aime pas son conjoint comme on aime ses enfants. Une petite fille peut dire à son père : “Quand je serai grande, je me marierai avec toi.” Il faut alors lui expliquer pour- quoi ce n’est pas possible. De la même façon, si un enfant voit ses parents s’embrasser sur la bouche, il comprend que ce n’est pas un bisou pour lui. “Il est, par ailleurs, très important de différencier cette relation parent-parent de la rela- tion parent-enfant quand il y a une séparation. Dans ce contexte, l’amour entre les parents s’éteint et les enfants ont une seule crainte, que l’amour que les parents ont pour eux s’éteigne également. S’il y a la moindre ambiguïté, l’enfant peut paniquer. Et avec le bisou sur la bouche, il risque d’être encore plus perdu dans sa quête de dif- férenciation.” concerne une zone particulière.” Et pour cause, ce contact sur les lèvres est érotique. Il est souvent la prémisse à l’acte sexuel. Voilà pourquoi la relation parent-enfant ne doit pas ressembler à une rela- tion amoureuse, ni dans les gestes ni à travers les mots. Évidemment, le parent qui embrasse son enfant sur la bouche, comme celui qui l’autorise à dormir dans son lit, n’est pas malveillant, mais il est plus simple pour l’enfant de s’y retrouver lorsque les limites sont clairement marquées. LIMITE D’ÂGE “Pour les parents qui tiennent à cette marque d’affection, et c’est leur droit, précise la psychologue, mieux vaudrait ne pas aller au-delà des 3 ans de l’enfant. Jusqu’à cette période, le petit ne va pas associer de connotation sexuelle ou sexuée au baiser. Au-delà, nous sommes de plain-pied dans la phase dite du complexe d’Œdipe, comprise entre 3 et 5 ans.” C’est l’étape où l’en- fant est attiré par le parent du sexe opposé. À partir de 4 ans, faire un bisou devient un geste intime. Ce n’est plus si anodin. L’enfant va l’associer au geste amoureux, puisque c’est aussi le geste que ses parents ont entre eux. Très tôt, mieux vaut mettre un terme à cet échange. “Vers 5/6 ans, l’enfant devient assez pudique et il est pos- sible que de lui-même, il ne veuille plus de bisous sur les lèvres. Et il y a aussi les bambins qui n’aiment pas embrasser. Alors, il ne faut pas les forcer, car le bisou en lui-même © SHUTTERSTOCK

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