ANFORM GUADELOUPE N93

novembre - décembre 2020 • anform ! 145 Q uand on parle de la naissance, on pense au nouveau- né. D’ailleurs, toute l’attention médicale et familiale est portée sur l’enfant. Et pourtant, lorsque le nourrisson prend son premier souffle, il se produit une deuxième naissance, celle de la mère ! La notion de “matrescence” veut dire que devenir mère est un bouleversement psychologique intense optimisé par les nombreux changements, la chute hormonale et la fragilité émotionnelle. CRISE IDENTITAIRE Cette nouvelle vision de la mater- nité est abordée en 1973 par Dana Raphael, une anthropo- logue américaine. À l’époque, elle choque les mentalités. Elle présente la maternité comme une crise d’adolescence. Elle dit vouloir instaurer une psychologie clinique de la maternité et de la périnatalité. La journaliste Clémentine Sarlat remet en avant cette notion de “matrescence” en 2019. Dans son podcast, elle parle de son expé- rience et de son “cheminement” vers la maternité. “À l’arrivée de son bébé, une maman se retrouve souvent face à des montagnes russes émotionnelles pouvant la déstabiliser psychologiquement. C’est un bouleversement émo- tionnel, psychique et physique.” L’histoire personnelle, la sensibilité, l’accompagnement du partenaire, l’entourage, l’accouchement… Tous ces facteurs seront détermi- nants dans le processus de crise, obligatoire et nécessaire pour devenir mère. Pour devenir adulte, nous passons par l’adolescence. Pour devenir mère nous passons par la matrescence. C’est une crise iden- titaire assez violente. On ne reconnaît plus son corps, on a des sautes d’hu- meur, des changements hormonaux. C’est une période ingrate, inconfor- table et déstabilisante. Chacune le vit à sa manière, tant dans la durée que dans l’intensité. Très souvent, cette période est confondue avec la dépression post-partum. Pourtant, ce n’est pas parce que les mamans pleurent qu’elles sont dépressives ! Elles ont aussi un sentiment culpa- bilisateur d’ambivalence psychique. En effet, le cerveau de la mère est en permanence branché sur le nou- veau-né. L’attachement au bébé permet à la mère de répondre à ses besoins vitaux, de lui apporter l’attention et les soins nécessaires à sa survie. Mais, en même temps, son esprit rejette cela, car la mère se souvient que son identité a aussi d’autres composantes : les relations sociales, le travail, les loisirs, une vie spirituelle et intellectuelle. Il y a aussi ses propres besoins physiologiques qui sont mis à mal (manger, boire, dormir, respirer, avoir une sexualité). Elle doit donc jongler entre ses besoins et ceux du nouveau-né. C’est un nouvel équilibre à trouver et à mettre en place. Il est important de se laisser du temps ! Il y a une période d’adaptation ou période d’essai, de tâtonnements et d’apprentissage pour •••

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