ANFORM GUADELOUPE N88

108 anform ! • janvier - février 2020 À en perdre la raison La psychiatrie en crise Pénurie de médecins, manque de moyens, bâtiments vétustes, travaux qui n’en finissent pas... Les services d’hospitalisation en psychiatrie de Martinique et de Guadeloupe souffrent. PAR BÉNÉDICTE JOURDIER sans intimité. Elle est maintenant partagée en plusieurs boxes” ,précise Alain Clavel, directeur adjoint de l’EPSM, en charge des travaux. “On essaie d’améliorer, tout en gérant inlassablement les problèmes.” PAS DE CLIMATISATION Depuis l’incendie de novembre 2017, l’accueil des urgences psychiatriques a nécessité des mesures provisoires qui se prolongent. Le service a démé- nagé à deux reprises avec à chaque fois des travauxengagés pour la sécu- rité des patients et des soignants. Des grilles sur les fenêtres, des jalousies en bois plutôt qu’en verre, et des portes qui se ferment et s’ouvrent vite en cas d’agressivité, sans oublier la climatisa- tion jusqu’alors absente ou inutilisable. “C’est du temporaire, en attendant un nouveau déménagement à côté des urgences générales au rez-de-chaus- sée du CHU de Pointe-à-Pitre”, espère Alain Clavel. Du temporaire qui dure et des conditions de travail déjà diffi- “L es patients se sont beaucoup trop souvent retrouvés attachés dès leur arrivée au Centre d’accueil de crise de Pointe-à-Pitre (CAC)”, dénonce le Dr Michel Eynaud, psychiatre à l’Établissement public de santé mentale (EPSM) de Guadeloupe. “Dans une salle commune, l’agita- tion de l’un peut être dangereuse pour les autres. C’est éthiquement inadmissible.” L’article 72 de la loi du 26 janvier 2016 sur la modernisation du système de santé précise en effet que “l’isolement et la contention sont des pratiques devant être utilisées en dernier recours et énonce clai- rement un objectif d’encadrement et de réduction de ces pratiques”, qui doivent être décidées par un psychiatre, si on ne peut pas faire autrement. Pour la direction, il s’agit de sécuriser le patient, àdéfaut d’es- pace adapté. “Avant, le CAC était une salle avec quatre lits sans cloison, ciles, témoigne une infirmière en poste depuis 1 an dans une unité fermée du secteur de Grande-Terre : “Les patients arrachent les fils électriques, cassent les fenêtres. Nous devons faire attention à tout ! Et il n’y a pas de climatisation. Elle est remplacée par un climatiseur mobile très bruyant.” “Il y a de l’eau, mais pas d’eau chaude et ce depuis plus de 10 ans” , s’indigne un autre per- sonnel de l’unité fermée du secteur de Pointe-à-Pitre en poste depuis 13 ans. “Pour éviter les confrontations avec les patients, il nous arrive de faire la toilette en chauffant l’eau à l’aide d’une bouil- loire. Sans oublier les infiltrations d'eau ou les repas incomplets. Il manque parfois le dessert ou l’entrée.” PRISE EN CHARGE RETARDÉE Dernièrement restructurée en Éta- blissement public de santé mentale, la psychiatrie en Guadeloupe peine encore àdresser un bilan positif, 1 an après le regroupement du Centre hos- pitalier de Montéran à Saint-Claude psycho © BÉNÉDICTE JOURDIER

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