ANFORM GUADELOUPE N76
134 anform ! • janvier - février 2018 trisable et peut faire peur. Alors, rationaliser devient plus évident. Pour une femme, devenir mère peut se transformer en un devoir, un statut. On parle de devoir maternel. La personne cherche alors les conditions parfaites. Elle idéalise son rôle, ce qui peut amener au refus de l’enfant. ” Sandy Calvet a été très déçue, très marquée par l’absence de son papa, parti l’année de ses 4 ans. “Je ne connais rien de mon père biologique. Je porte le nom de mon beau-père. Il m’a adoptée. Je préfère rester célibataire plutôt que gérer une famille recompo- sée.” Selon le psychologue clinicien et psychothérapeute, il y a parfois dans la naissance, la volonté de réparer sa propre histoire : “On cherche à offrir à son enfant une meilleure vie que la sienne. Parfois, on croit que l’on ne sera jamais apte à s’occuper de quelqu’un. S’il n’y a pas eu résilience, faire un enfant est douloureux. On est dans le schéma du traumatisme de l’enfance. Si faire un enfant c’est transmettre, dans le cas de Sandy, c’est une transmission de la souf- france interrompue.” Comme Sandy et Raphaël, Monique Méderic a mal sup- porté le divorce de ses parents. “J’ai toujours eu un sentiment d’abandon. D’avoir été laissée-pour-compte. Plus les années passent et plus je sais que je ne suis pas faite pour les enfants, psychologiquement et financière- ment ! Si je tombe enceinte, je rentre en dépression.” À31 ans, Monique vit avec son compagnon, père de deux enfants. “J’ai fini par trouver ma place en tant que belle-mère, mais ce n’était pas évident pour moi. J’ai plus la fibre de tatie. Mon entourage ne me comprend pas. Àchaque réunion, nous avons des remarques, surtout de la part de ma mère.” “L’enfant a une place très importante dans la société, affirme Désiré Framée. Ceux qui ont donné naissance parlent du plus bel événement de leur vie. Dans certains cas, chez lamère, on parle de mécanisme d'identification projective, ce qui correspond à une compré- hension presque magique entre elle et le bébé. Alors quand on ne veut pas d’enfant, aux yeux de certains parents, c’est qu’on ne veut pas se dévouer à l’autre. On a alors tous les défauts du monde. On est égoïste.” La psychologue Chimène Girard-Petrus conclut : “Ne pas désirer d’enfant, c’est accepter de s’exposer à des questionnements intimes, puisque dans la représentation collective, cette situation minoritaire est perçue de façon péjorative.” Aux États-Unis, un mouve- ment appelé childfree (sans enfant par choix) a vu le jour dans les années 1970. Il a même donné lieu à la création de l’Organization for Non-Parents devenue ensuite la National Alliance for Optional Parenthood. D’autres associations ont depuis vu le jour au Canada, en Angleterre ou en France où se tenait en 2011 la Fête des non-parents. Pour soutenir ceux qui ont fait ce choix. Parmi les raisons défendues par ces organi- sations : refus de sacrifier sa vie privée, volonté de ne pas transmettre à l’enfant son patrimoine génétique, conviction que créer la vie est un acte égoïste, volonté de ne pas subir la grossesse et l’accouchement, conviction que la maternité est un frein dans la vie d’une femme… Il y a aussi ceux qui renoncent à la parentalité pour des raisons écologiques comme la surpopulation et l’épuise- ment des ressources. Un mouvement qui prend de l’ampleur ! Monique Méderic “Je ne suis pas faite pour les enfants, psychologiquement et financièrement ! Si je tombe enceinte, je rentre en dépression.” © BÉNÉDICTE JOURDIER
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