

septembre - octobre 2016
•
anform !
167
Par LUCIE DANIEL
Malgré le succès du Grand bleu de Luc Besson,
l’apnée reste une activité méconnue. Un sport
qui ne se pratique pas à la légère, même si
certains accidents pourraient être simplement
évités.
L
a mer est calme et le
temps radieux en cette
matinée au large de nos
côtes. Antoine, apnéiste
chevronné, chasse avec un ami.
Après une belle apnée à 30 m,
il remonte tranquillement pour
reprendre de l'air quand arrivent
5 énormes thazards. Il s'arrête, at-
tend leur approche. Un des poissons
arrive dans sa limite de tir. C'est
alors que le plongeur sent se tendre
le câble qui le rattache à la surface.
Sans même s'en apercevoir, trop
accaparé par son poisson, il était
redescendu à 30 m .
“Àce moment-
là, j'ai compris que j'avais fait une
erreur car j'avais vraiment envie de
sortir la tête de l'eau”
, raconte l'ap-
néiste. Antoine remonte en s'éco-
monisant au maximum. Mais arrivé
à la surface, il se met à trembler de
tout son corps. Il fait ce qu'on ap-
pelle une perte de contrôle moteur,
ou “samba” dans le jargon des ap-
néistes, en référence à la danse bré-
silienne. Un accident neurologique
dûau manque d'oxygène au niveau
du cerveau. Heureusement, son
équipier est là. Il le récupère et lui
évite la noyade. Un jour de chance ?
Pas vraiment. Toutes les règles de
sécurité étaient respectées. Antoine
ne plongeait pas seul, sans quoi
l'accident lui aurait été fatal. Il avait,
en outre, annoncé à son binôme ce
qu'il allait faire, permettant ainsi à
son ami d'avoir une surveillance
efficace. Enfin, ce dernier était for-
mé pour reconnaître les signes de
l'accident et intervenir. D'ailleurs,
Antoine Maestracci est loin d'être un
novice. Ancien capitaine de l'équipe
de France d'apnée, il est actuelle-
ment président du comité régional
de la Fédération française d'études
et de sports sous-marins (FFESSM).
Comme quoi, un accident peut arri-
ver à tout le monde. Aucun poisson,
aussi gros soit-il, ne vaut la peine
de risquer sa vie. Mais quand le cer-
veau commence à manquer d'oxy-
gène, il n'est malheureusement pas
toujours aisé de prendre les bonnes
décisions.
seuil critique
Lors d'une apnée, les échanges
gazeux sont stoppés avec le milieu
extérieur alors que les organes et les
muscles continuent à consommer
de l'oxygène et à produire du CO
2
.
Plus le temps passe, plus la concen-
tration en oxygène diminue dans le
sang, tandis qu'augmente celle de
CO
2
. Le corps se met d'ailleurs en
mode “économie”. Les membres
sont soumis à une vasoconstriction
pour limiter la consommation en
oxygène et conserver les “déchets”
issus de la combustion de l'oxy-
gène (notamment le CO
2
et l'acide
lactique) tandis que le cœur et le
cerveau connaissent une vasodila-
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